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Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 1.djvu/652

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ardens, puissans, actifs, opiniâtres. Lorsque le protestantisme fut dans sa période ascendante, on put croire à tout moment que la plus grande partie de ce terrain disputé lui resterait. Une insurrection heureuse une ligue de nobles, moins que cela, le caprice d’un roi pouvait lui livrer la plupart de ces peuples. En France, les protestans traitaient avec le roi de puissance à puissance ; ils avaient leurs places fortes leurs armées, leur gouvernement. En Pologne, les protestans dominaient la diète, et le roi, le dernier des Jagellons, ne tenait plus que par un fil au catholicisme. En Bavière, les protestans avaient la majorité dans les états, et achetaient des concessions favorables à leur culte avec des subsides. L’empereur Maximilien était toujours prêt à faire le même trafic avec ses sujets réformés. En Transylvanie, la diète confisquait les biens des églises. En Belgique, on comptait les réformés par centaines de mille. Telle était la position du protestantisme vis-à-vis du catholicisme cinquante ans après le schisme. Cinquante années s’écoulèrent encore, et tout était changé. Le catholicisme avait repris tout ce qui lui avait été ravi : il régnait sur la France, la Belgique, la Bavière, la Bohême, l’Autriche, la Pologne et la Hongrie. La réforme, dans son premier choc, avait failli le jeter dans la Méditerranée, et maintenant, dans son reflux, le catholicisme la refoulait elle-même jusqu’à la Baltique. Le protestantisme ne devait plus jamais recouvrer aucune des conquêtes qu’il perdit alors.

Même au point de vue purement humain, il n’y a pas dans l’histoire de spectacle plus admirable que celui du travail que le catholicisme accomplit alors sur lui-même. Une ferveur qui rappelait l’âge héroïque du christianisme vivifia l’église tout entière, ses doctrines, son sacerdoce, ses fidèles. Le dogme avait été ébranlé, contesté, nié par mille sectes. Le dogme fut contrôlé de nouveau, raffermi, commenté par le concile de Trente. Le protestantisme s’était élevé contre le relâchement de la discipline de l’église ; le concile restaura par ses décrets de réformation le grand corps de l’église. Le raffermissement des doctrines fut pourtant le côté le moins remarquable de la renaissance catholique. À la base de l’église, au sein des masses catholiques, il y eut une explosion de foi, d’enthousiasme parallèle au mouvement d’initiative individuelle qui remuait les protestans ; au sommet, le principe d’autorité se régénéra par les vertus et le zèle énergique des nouveaux papes. Tandis qu’au sein du protestantisme les ébullitions de l’esprit religieux se traduisaient chaque jour en nouvelles sectes, dans le catholicisme les élans de la piété individuelle enfantaient des ordres religieux, et au lieu de susciter des divisions, apportaient sans cesse de nouvelles forces, de nouveaux instrumens au principe d’autorité. Un an après la mort de Léon X, l’ordre des camaldules se réforma ; les capucins restaurèrent la vieille discipline de saint François ; les barnabites se vouèrent