phe ? Le ministre de la guerre de la république romaine, M. Campello, qui ne l’est déjà plus, annonçait tout récemment à la constituante qu’on ne pouvait pas donner au public d’états officiels de l’armée, tant l’armée manquait de tout, tant les soldats eux-mêmes y manquaient ; il y avait beaucoup de demandes, ajoutait-il pour les postes d’officiers, très peu pour celui de soldats. Et cependant c’est avec ces troupes déguenillées et démoralisées que M. Mazzini s’est aussitôt empressé de mettre la ville de Ferrare en hostilité ouverte contre les Autrichiens qui tiennent garnison dans la citadelle. Qu’eût-il fait de plus à propos, s’il eut voulu livrer son pays ? et quelle triste condition de cet enthousiasme maladif, d’être aussi funeste que la trahison ! Les Autrichiens, malencontreusement provoqués ont reçu du renfort, sont entrés dans la ville, et n’en veulent plus sortir sans des conditions aussi onéreuses qu’humiliantes. Bologne s’apprête à la résistance ; mais, d’après les récits originaux, il est évident que le patriotisme italien compte bien plus sur les régimens suisses de Bologne et de Forli que sur les Bolonais eux-mêmes.
Les républicains de Florence ne sont pas plus riches en forces militaires que leurs frères de Rome ; ils ont proclamé définitivement la déchéance du grand-duc et la royauté du peuple, grace à l’invasion des clubs de Livourne ; mais le peuple-roi a déjà fort à faire de se couvrir contre les deux mille hommes et les quelques canons du général Laugier, qu’il a mis hors la loi. Les dictateurs florentins peuvent bien emprunter à notre révolution de février nos ateliers nationaux et nos volontaires patriotes ; ils ne feront pas avec tout cela des soldats qui se battent devant l’ennemi. L’ennemi, du reste, pouvait et peut encore arriver d’un moment à l’autre, et, de ce côté-là, ce ne sont pas les Autrichiens, ce seraient les Piémontais qui, par le duché de Lucques, se mettraient en communication avec les grenadiers et les vélites toscans restés fidèles à leur prince.
C’était, en effet, là le meilleur plan de conduite pour remédier aux folies révolutionnaires sans empirer le sort de la nationalité italienne ; c’était que les Italiens eux-mêmes fissent la police de l’Italie. M. Gioberti comprenait bien qu’une intervention en Toscane avait pour le Piémont toute espèce d’opportunité ; elle ajournait la reprise des hostilités avec l’Autriche, elle facilitait peut-être un arrangement, elle était l’obstacle le plus sûr aux envahissemens autrichiens dans la Péninsule ; elle protégeait enfin à Turin même le principe constitutionnel contre les manœuvres du radicalisme. M. Gioberti a voulu amener ses collègues à voir comme lui, mais il s’est alors aperçu du tort qu’il avait eu de les prendre où il les a pris, et telle a été l’occasion de la crise qui dure encore au sein du gouvernement piémontais, de l’émotion qui soulève la capitale et le pays entier. Porté au ministère par un mouvement presque révolutionnaire auquel il n’avait pas assez évité de s’associer, M. Gioberti s’est trouvé malheureusement représenter des opinions qui n’étaient pas les siennes : il a eu dans la chambre une majorité à peu près radicale qui lui a imposé un cabinet de sa couleur. De là naturellement dissidence et dissolution, quand il s’est agi de savoir si l’on reconnaîtrait les deux républiques de Rome et de Florence. M. Gioberti eût délaissé les convictions de toute sa vie en faisant acte d’adhésion au républicanisme unitaire. Cette adhésion n’avait rien au contraire qui pût effaroucher M. Brofferio, un républicain dissimulé, dévoué secrètement à cette propagande turbulente que les mazzinistes semblent aujourd’hui vouloir