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LES ÉTATS D’ORLÉANS.
LE PRINCE DE CONDÉ.

Eh bien ! voyons, parlez. — Dardois, veuillez descendre ; vous m’annoncerez au connétable. Je veux aller le recevoir aux portes du château. (Dardois sort.)

BOUCHARD, à part.

Maintenant jouons serré. C’est notre dernière carte !

LE PRINCE DE CONDÉ.

Allons, Bouchard, parlez donc.

BOUCHARD.

Monseigneur, vous me voyez dans un grand embarras. Je donnerais le peu que je possède, et ma vie par-dessus le marché, pour que le roi, mon bien-aimé maître, n’allât pas à Orléans. Depuis qu’il s’est mis en tête un dessein que vous blâmez si justement, j’en perds le sommeil et l’appétit ; et pourtant, si vous ne venez à mon secours, je vais peut-être le pousser, malgré moi, à se faire prendre à cette glu.

LE PRINCE DE CONDÉ.

Qu’est-ce que cela veut dire ?

BOUCHARD.

Pardon, monseigneur, vous m’allez comprendre. Tout à l’heure, pendant que le roi donnait les baisers d’adieu à M. le cardinal…

LE PRINCE DE CONDÉ.

Comment ! pas encore parti ?

BOUCHARD.

Dans un instant il sera hors du château ; mais, pendant qu’on disposait sa litière, le roi nous tournant le dos et tout entier à M. son frère, j’ai reçu certaines lettres qu’à leur forme et aux armes dont elles sont scellées, j’ai reconnues lettres royales et venant tout droit d’Orléans.

LE PRINCE DE CONDÉ, avec impatience.

Eh bien !

BOUCHARD.

Je me suis senti fort empêché, car mon devoir me commandait de porter ces lettres à mon maître ; et cependant je me disais : Si ce sont invitations pressantes, promesses, sauf-conduits, que sais-je ? c’en est fait, nous ne pourrons jamais retenir le roi. Alors j’ai pensé que M. le prince de Condé pouvait seul prendre sur lui ce qu’il convient de faire, le suis venu bien vite m’en remettre à sa prudence. Maintenant monseigneur doit comprendre, et j’espère qu’il pardonne mon insistance et mon importunité.

LE PRINCE DE CONDÉ.

Très bien. Mais le messager, où est-il ?