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Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 2.djvu/551

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pouvait espérer agir sur l’imagination des populations en leur disant que dorénavant elles seraient gouvernées comme toujours elles auraient dû l’être, et qu’elles ne verraient plus désormais à la tête de leurs affaires que des hommes dignes de leur confiance. Le roi, moins que personne, ne se faisait illusion. Il le sentait bien, une seule concession lui restait à faire qui pût calmer l’impatience de ses peuples l’octroi d’une constitution. C’était du premier pas dépasser tout ce que les autres princes avaient osé. Entre une inaction complète ou cet acte de résolution, point de milieu possible. Cela valait la peine de réfléchir et peut-être d’attendre un peu ; mais, ainsi qu’il est toujours arrivé au gouvernement napolitain dans toutes les crises qu’il lui a fallu traverser, ses plus fâcheux embarras surgirent du côté de la Sicile. Il est impossible d’étendre à l’organisation intérieure de la Sicile les éloges que nous donnions tout à l’heure à l’administration des provinces napolitaines. Le régime habituel de cette île, c’était le règne incontesté du chaos et de l’anarchie. Une fois de plus encore, le gouvernement napolitain devait chèrement expier sa coupable négligence des intérêts siciliens, l’oubli complet de ses devoirs envers la plus belle portion des états de sa majesté le roi des Deux-Siciles. Dès le milieu de 1847 ; le retentissement des premières réformes introduites par Pie IX surexcita dans toute l’étendue de la Sicile le désir d’une prompte répression des abus dont on souffrait depuis si long-temps. Les symptômes évidens du mécontentement populaire ne permettaient pas de se faire illusion. Si l’on s’obstinait à refuser les légitimes satisfactions, il était trop à craindre qu’au lieu d’une juste demande de réforme on n’eût à repousser bientôt des prétentions de séparation ou d’indépendance. Le roi Ferdinand ouvrit les yeux ; il comprit la nécessité d’envoyer dans la Sicile des hommes publics autres que ceux qui en avaient jusqu’alors dirigé les affaires. Dans les premiers jours de décembre 1847, le duc de Serra-Capriola, homme de bien et capable, ambassadeur du roi de Naples à Paris, reçut de son souverain l’avis de sa nomination comme lieutenant-général en Sicile et l’invitation pressante de retourner à Naples pour se rendre immédiatement à son poste. En même temps, le roi promit formellement que, pour le 12 janvier 1848, il aurait envoyé, avec le nouveau lieutenant-général, les réformes qu’il croyait nécessaires dans l’état présent de la Sicile. Le choix du duc de Serra-Capriola ne pouvait pas ne pas être agréable aux Siciliens, et les engagemens pris au sujet des réformes avaient calmé leurs esprits. Des accidens insignifians en eux-mêmes, comme il n’en survient que trop dans les affaires publiques, déconcertèrent cette combinaison. Le duc de Serra-Capriola, retardé dans ses préparatifs de départ, détourné de sa route par des circonstances de famille, n’arriva à Naples qu’un mois après la réception des ordres du roi. Ce retard mit le roi dans l’impossibilité de tenir