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s’entendre ; mais, en Sicile, l’Angleterre a des intérêts particuliers qui ne doivent pas regarder la France. » Peu de jours après cette conversation, ce n’était plus lord Napier qui devait passer en Sicile, c’était lord Minto. M. de Bussières, notre nouvel ambassadeur à Naples, qui venait d’arriver, voulut accompagner lord Minto, comme M. de Montessuy avait voulu accompagner lord Napier. Survint la nouvelle de l’installation de la république. Lord Minto partit seul. On sait ce qui est advenu.

Nous n’avons rien à ajouter à ce simple récit. Le gouvernement tombé en février 1848 a-t-il gêné en rien le mouvement réformateur italien, ou bien l’a-t-il, autant que cela dépendait de lui, favorisé et développé ? Nous tenons cette question pour vidée par les faits, par les dates, par les pièces que nous avons citées. M. Guizot et M. Rossi ont-ils eu tort de recommander aux princes et aux peuples italiens de ne pas déserter la cause des réformes pour la cause de l’indépendance, de ne pas aller follement attaquer l’Autriche chez elle ? Après les déroutes de Milan et de Novare, il n’y a pas deux réponses possibles. « Parmi les sentimens qui animent les populations italiennes, disait M. Guizot en janvier 1848[1], et qui leur font désirer des événemens que je regarde comme chimériques ; il en est de très généreux, de très nobles, de très bons, qu’il est douloureux d’affliger ; mais il vaut mieux les affliger que de les tromper. » — Si jamais la liberté périt en Italie, disait M. de Montalembert dans la même discussion, si jamais l’Autriche y reprend l’ascendant qu’elle semble destinée à y perdre, ce sera grace aux révolutionnaires italiens, à eux seulement. Ils sont les véritables complices, les seuls et les plus dangereux complices de l’influence et de la prépotence autrichienne. — M. Guizot et M. de Montalembert étaient-ils alors les vrais amis de l’Italie et de bons prophètes ? ou bien était-ce M. de Lamartine, prêchant du haut de la tribune française à cette nation abusée la rupture des traités et la croisade contre l’Autriche ? M. de Lamartine et les révolutionnaires qui couvraient sa parole de leurs frénétiques applaudissemens se sont trouvés au pouvoir quand a éclaté la lutte terrible qu’ils avaient eux-mêmes provoquée. Comment ont-ils tenu leurs engagemens ? Quel rôle ont-ils fait jouer à la France ? Hélas ! nous avons eu tous à en rougir, et par honneur il faut s’en taire. Aujourd’hui, si notre pays reprend le rôle qu’il lui convient de jouer en Italie, c’est qu’enfin il a abandonné les erremens de leur détestable politique. Contre qui s’avance en ce moment l’expédition française ? N’est-ce pas précisément contre les exaltés qui accusaient si fort jadis les tendances

  1. Discussion de la chambre des pairs. (Moniteur du 15 janvier.)