L’hiroundelo fugio nostre ayre bengut fret ;
Nostre tan bel sourel se fazio soureillet,
La campagno tournabo mudo
Al nègre beni de Toutsan ;
Et de la cabeillo mièy nudo
La feillo jaouno et fregeludo
Toumbâbo morto en biroulan.
Un tantos, al sourti d’une bilo bezino,
A l’houro oun lou ciel s’illumino
Dus pichous, fray et so, paresquéron tout souls ;
Tout dus à l’un cot gemisqueron ;
Apey daban la crouts del cami s’en angueron
Et s’y bouteron à ginouls.
Abel, Jano, al cla de la luno
Restèron lounten sans poulsa ;
Apèy coumo l’orgo à l’aouta
Las dios boues fasqueron tinda
Dios prieros que n’en fan q’uno
Et qu’al ciel semblabo mounta :
« May de Diou, bierges pietadouzo
« Mando toun angel che nous aou
« Et garis nostre pay malaou ;
« Nostro may tournara jouyouzo
« Et nous-aou dus, biergeto-may,
« T’aymaren se pouden, enquero, enquero, may ! »
« L’hirondelle fuyait notre air devenu froid ; — notre si beau soleil se faisait soleillet ; — la campagne redevenait muette — à la noire approche de la Toussaint, — et de la cime moitié nue (de l’arbre) — la feuille jaune et frileuse — tombait morte en tournoyant. — Un soir, à la sortie d’une ville voisine, — à l’heure où le ciel s’illumine, — deux enfans, frère et sœur, parurent tout seuls. — Tous deux à la fois soupirèrent ; — puis, devant la croix ils s’en allèrent, — et s’y mirent à genoux. — Abel, Jeanne, au clair de la lune, — restèrent long-temps sans parler ; — ensuite, comme l’orgue à l’autel, — les deux voix firent tinter — deux prières qui n’en faisaient qu’une, — et qui au ciel semblaient monter : — « Mère de Dieu, Vierge compatissante, — envoie ton ange dans notre maison — et guéris notre père malade ; — notre mère redeviendra joyeuse, — et nous autres, Viergette-mère, — nous t’aimerons, si nous pouvons, encore, encore mieux !… »
Il est difficile sans doute de rendre complètement le charme gracieux et poétique de ces vers consacrés à la prière commune de deux enfans ; il est plus aisé, il me semble, d’en saisir le sentiment dans sa pureté.