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-Unis, non-seulement ne fut pas inique mais fut la gardienne de la liberté. Dura lex, sed lex. Il fut pénible de l’appliquer à la famille de Fulton ; mais ce fut juste et sage. Avec des précédens pareils aux actes qu’avait passés la législature de New-York, la porte était ouverte à mille abus, à mille atteintes contre la liberté du travail. La législature de New-York s’était égarée dans son désir de témoigner à Fulton le prix qu’elle attachait à sa découverte. Elle lui avait donné ce dont il ne lui appartenait pas de disposer ; elle avait dépouillé les citoyens d’un droit naturel. La cour suprême des États-Unis remit toute chose à sa place. Que penserions-nous de l’assemblée nationale, si, pour témoigner la gratitude de la France à quelqu’un de nos généraux, elle lui décernait un fief ou restaurait pour lui de toute autre manière des institutions incompatibles avec le droit commun ?

V. — LA LIBERTÉ DES PROFESSIONS À L’ÉGARD DES OFFICES ET DES PROFESSIONS LIBÉRALES POUR LESQUELLES EN EUROPE ON DOIT ÊTRE GRADUÉ.

Le privilège qui, en France, résulte de la vénalité des charges instituées à titre onéreux par la loi du 28 avril 1816, et, en divers autres pays, s’appuie sur des règlemens qui ont fixé, dans un intérêt public réel ou supposé, le nombre des personnes admises à exercer de certains ministères, n’existe pas aux États-Unis. Chacun est libre de se faire commissaire-priseur, agent de change, huissier, avoué, notaire, autant que ces professions ont leurs analogues en Amérique, car le mécanisme judiciaire et ministériel y est tout différent[1].

La tendance, aujourd’hui, est de supprimer même les garanties que la société avait cru devoir exiger de l’homme qui aspire à défendre la veuve et l’orphelin, ou de celui qui prétend instrumenter la vie de ses concitoyens. Sur ce point, chaque état fait ses lois comme il l’entend. L’autorité fédérale ne pourrait intervenir, en la personne de la cour suprême des États-Unis, que si quelqu’un des principes généraux posés par la constitution des États-Unis était violé. Comme il y a trente états, il y a donc trente législations. Elles ont, presque dès l’origine, été beaucoup plus faciles pour l’octroi des diplômes qu’on ne l’est en Europe. La facilité cependant résidait plutôt dans les hommes qui appliquaient la loi que dans la lettre de celle-ci, du moins pour les gens

  1. Ainsi, le notaire, qui, chez nous, est un agent nécessaire dans les conventions civiles des particuliers, ne se retrouve pas, à proprement parler, en Amérique. On passe les actes sous seing-privé comme on le veut, et on les fait enregistrer soi-même au greffe d’un tribunal. Il y a des notaires publics dans la plupart des états. Leurs attributions se restreignent à passer les actes qui doivent faire foi dans un autre état, aux procurations, et à recevoir de certaines dépositions. Il est dans la nature des choses qu’ils soient considérés comme des fonctionnaires et nommés de la même façon. Ils tiendront leur mandat du gouverneur, par exemple, assisté de son conseil, pour un nombre d’années déterminé.