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que nous importons pour cet usage[1], à des prix triples de celui des nôtres, témoignent de l’étendue des besoins auxquels les salines de Salces pourraient être appelées à pourvoir.

Plus de la moitié du célèbre vignoble de Rivesaltes appartient à la commune de Salces. Il partage avec la plupart de ceux du département le mérite peu commun de valoir encore mieux que sa réputation : il s’étend sur une surface de 3,832 hectares au pied de coteaux incultes, dont la vigne conquerrait la plus grande partie, sans l’insalubrité qui énerve et décime les cultivateurs. Ces vins et la plupart de ceux des vallées de la Tet et de l’Agly prennent la mer sur la plage de Saint-Laurent de la Salanque, située entre la seconde de ces rivières et l’étang de Leucate. Le voisinage des vignobles et la direction d’une route départementale vers la mer sont les seules circonstances qui aient fait choisir ce point de la côte pour l’embarquement : tout autre aurait offert d’aussi bonnes conditions nautiques. Juin, juillet et août, disent les Espagnols, sont les meilleurs ports de la Méditerranée. C’est surtout en effet dans bette saison que des barques peu propres à de lointaines expéditions accostent, toutes les fois que le temps est beau, la plage de la Salanque : elles s’éloignent ou se tirent à terre, comme les vaisseaux des anciens, aussitôt que l’azur du ciel se trouble, et font rarement autre chose que transporter à Port-Vendres, à Agde ou à Cette, les vins dont elles se chargent. Le mouvement maritime de la plage est de 30 à 40,000 tonneaux, et si, dans son état naturel, elle pourvoit imparfaitement aux besoins du commerce, il ne faut pas moins s’en contenter : l’art serait impuissant à l’améliorer, et le peu d’importance du tonnage ne justifierait pas la dépense d’un changement de système.

Il en serait autrement pour peu que les sels de la fontaine de Salces ressemblassent à ceux de Saint-Ubes. La recherche des moyens d’améliorer l’atterrage serait alors d’autant plus opportune que les frais de transport jusqu’à l’embarquement entrent, la plupart du temps, dans le prix des sels marins, pour une portion plus forte que les frais directs de fabrication. C’est une marchandise dont le débit se règle surtout sur la facilité d’accès des lieux de la récolte, et les salines renommées de Saint-Ubes doivent elles-mêmes à l’économie des chargemens, presque autant qu’à la qualité de leurs produits, l’immensité des exportations qu’elles alimentent. Sous les Romains, les navires devaient aborder les salines de Salces : on creuserait sainement aujourd’hui, pour

  1. Nos importations de sels de Portugal se sont élevées : En 1844 à 18,650,958 kilogrammes. En 1845 à 10,248,759. En 1846 à 28,319,647. En 1847 à 24,079,025.