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les diplomates polonais au milieu de vastes plans, dont les bases étaient assises sans avoir pourtant reçut tout leur développement. Est-ce un désastre irréparable ? Non, et je ne prends point cet espoir dans les éventualités de la guerre de Hongrie, parce que les Magyars, avec toute leur bravoure, n’ont nulle chance d’échapper à une ruine complète, s’ils n’obtiennent pas le secours d’une guerre entre la Prusse et l’Autriche ou entre la Russie et les Turcs. Quoique possible, semblable guerre n’est pas probable. Je raisonne donc sur la Pologne indépendamment de la fortune des occasions, et je ne demande rien pour elle au hasard. C’est dans les évolutions logiques des événemens, c’est dans le progrès naturel de l’idée de nationalité, que la race polonaise a droit de fonder ses calculs. Les idées justes ne périssent pas : le slavisme libéral ne sera pas submergé dans le naufrage de la Hongrie. Je crois, pour mon compte, aussi vivement que jamais à la possibilité d’une Autriche constitutionnelle et slave. Je déplore amèrement que le magyarisme ait rendu l’alliance des Russes nécessaire à la maison d’Autriche. Je gémis en contemplant, à travers tant de ruines cette armée du panslavisme attirée au cœur de la Hongrie par l’héroïsme funeste des Magyars ; mais j’ai la confiance qu’une Autriche slave et constitutionnelle, telle que l’a voulue la diète de Kremsier, telle que la promet de nouveau le jeune empereur, ne serait pas long-temps l’humble alliée des Russes. L’Autriche, dans ce cas, deviendrait, bon gré mal gré, l’arche du slavisme libéral, ce que les Polonais eux-mêmes ont espéré quelle serait, lorsque les Slaves élevaient au trône le fils de l’archiduchesse Sophie, après avoir sauvé l’empire. Or l’avenir de la Pologne n’est pas perdu tant que l’on peut compter sur l’avenir du slavisme.


HIPPOLYTE DESPREZ.