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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 août 1849.

Nous avons toujours voulu et toujours défendu l’expédition d’Italie. Nous nous réjouissons donc toutes les fois que nous la voyons justifier éloquemment à la tribune, comme l’ont fait M. de Tocqueville et M. de Falloux. Nous croyons même avec M. de Falloux que cette expédition n’a eu qu’un tort : elle s’est faite trop tard ; il fallait la faire dès le 20 décembre, quand le gouvernement de la présidence a été installé. Il fallait achever la pensée qu’avait eue le général Cavaignac, et qu’il avait laissée incomplète. Ce coup porté à la démagogie eut prévenu les malheurs dont elle a affligé l’Italie ; elle eût prévenu la guerre désastreuse qu’a soutenue le Piémont. Allié à la France, pour intervenir à Rome et pour rétablir l’autorité pontificale, il eût, dans cette guerre faite à la démagogie, trouvé la force de faire plus tard la guerre à l’Autriche et de la faire au moment favorable. La cause de l’indépendance italienne n’eût pas péri à Novarre.

Nous ne prononçons qu’avec une douloureuse émotion le nom de Charles-Albert. Tout nous émeut dans la destinée de ce prince, sa foi en la cause italienne, son épée tirée deux fois pour cette cause avec des sentimens divers et toujours généreux : la première fois, avec un enthousiasme que récompensèrent des commencemens de victoire ; la seconde, avec un désespoir héroïque et comme pour savoir si tous ces héros de cafés et de clubs qui le poussaient sur le champ de bataille oseraient l’y suivre. Cette abdication qui dégage l’avenir de sa patrie, cette retraite et cet exil qui le séparent du monde, cette mort enfin qui lui vient de la plaie qu’il portait en son ame depuis la défaite de son pays, cette mélancolie patriotique, si conforme à la fortune de l’Italie et à cette idée de l’indépendance qui est le chagrin des générations qui l’espèrent et le désastre des générations qui la tentent, tout cela nous inspire pour Charles-Albert une pitié pleine de vénération. Ah ! puissent les cendres du glorieux vaincu de Novarre être ramenées d’Oporto dans son pays natal, afin que, pour tous ceux qui feront le pèlerinage d’Italie et qui voudront, après les tableaux et