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[1] ! On lui reprochait d’éparpiller ses travaux, de tout entreprendre et de ne rien finir, et il a laissé 2,000 kilomètres de chemins de fer en exploitation, et 1,000 kilomètres à la veille d’être exploités ! Le gouvernement qui les inaugure ne se fait pas sans doute l’illusion qu’il les a construits : ce sont les travaux de la monarchie qui ont préparé les fêtes de la république.

Toutes ces objections, et bien d’autres encore, sont oubliées aujourd’hui ; une seule objection demeure et mérite d’être examinée. Le gouvernement n’avait-il pas trop entrepris, et les ressources ne lui auraient-elles pas fait défaut pour mener à fin une si grande entreprise Mesurons-en d’abord l’étendue. Il ne faudrait pas croire que tous les crédits ouverts dussent être employés. Le système des concessions avait fait de grands progrès, il avait allégé les charges de l’état, peut-être devait-il les alléger encore ; mais enfin, au 1er janvier 1848, la dépense des travaux qui étaient déjà exécutés, ou qui devaient s’exécuter dans les conditions financières de la loi du 11 juin 1842, s’élevait à 1,081,000,000 de francs. C’est un chiffre convenu ; il a été établi dans un document du dernier gouvernement et accepté dans un document du gouvernement nouveau[2]. C’étaient les projets d’un temps de paix conçus pour un temps de paix. L’état n’avait d’engagement qu’avec quelques compagnies concessionnaires. Si les circonstances avaient changé, il pouvait ajourner ou ralentir tous les travaux non concédés : tels étaient le prolongement du chemin de l’ouest et du double chemin du centre ; tels étaient encore les travaux de routes, de ports, de canaux et de rivières. Dans des circonstances difficiles, l’état restait libre de réduire ses projets ; dans des circonstances favorables, il pouvait les exécuter jusqu’au bout.

Déjà même cette vaste entreprise était presque au milieu de son cours. Sur 1 milliard 81 millions, nous avons vu qu’au 1er janvier 1848, 441 millions étaient dépensés et payés. Cette dépense, il est vrai, avait été en grande partie supportée provisoirement par la dette flottante ; mais nous avons vu aussi que les ressources étaient prêtes pour la dégager[3]. Il restait donc à pourvoir, dans une série de plusieurs années, à 640 millions de ressources.

Il eût été imprudent de compter exclusivement sur les réserves de l’amortissement. C’eût été compromettre ou du moins retarder beaucoup la libération de l’état. L’expérience avait appris que, dans une

  1. En 1846, la circulation a été de 90,962 tonnes, parcourant toute la distance ; en 1847, elle a été de 147,179 tonnes.
  2. Exposé des motifs du 3 janvier 1848. — Rapport au gouvernement provisoire du 9 mars suivant.
  3. Voir plus haut, page 907, en note. (note 36)