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Le Marquis.

Vous vous défaites vous-même ?

La Marquise, arrangeant ses cheveux.

Personnellement… mon Dieu ! oui.

Le Marquis.

Vous avez une chevelure éblouissante.

La Marquise.

Vous êtes bien bon.

Le Marquis.

Vous êtes trop jolie pour être ma femme, savez-vous ?

La Marquise.

C’est possible. Mettons donc que je ne la sois pas.

Le Marquis.

Je veux dire qu’on ne peut aimer comme sa femme quelqu’un qui vous ressemble : on l’aime davantage.

La Marquise.

On a de la peine à s’y décider toutefois.

Le Marquis.

S’il y a un amour qui ait quelque valeur, ne pensez-vous pas que c’est celui qui naît avec connaissance de cause ?

La Marquise.

Voulez-vous recommencer votre métaphysique ? Allons, bonsoir, bonsoir.

Le Marquis.

Vous êtes miraculeusement jolie, et je suis… ma foi ! je suis indigne de mon bonheur. (Il se lève, et prend un flambeau.) Permettez-vous à votre mari de vous éclairer jusque chez vous, madame ?

La Marquise.

Mais êtes-vous en état de grâce, dites-moi ?

Le Marquis.

Comment l’entendez-vous ?

La Marquise.

Votre conscience est-elle suffisamment tranquille, et n’avez-vous pas à vous confesser de quelque chose par le monde ?…

Le Marquis.

En vérité, ma chère, je ne…

La Marquise.

Ne voyez-vous pas que je sais tout ?