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Cette bonne et vraie république du père Étienne, c’est celle qui a commencé le 24 février 1848, et qui a fini le 24 juin dans le sang et dans les larmes. C’est celle qui peut recommencer, si nous ne savons pas rester unis. Tâchons donc d’entendre les avertissemens de nos ennemis, si nous gardons encore quelque défiance contre les conseils de nos amis.

— Les incompatibilités parlementaires de M. Moron n’ont pad fait fortune dans le congrès espagnol. Cette malencontreuse proposition, écho trop peu déguisé de quatre ou cinq désappointemens individuels qui visent à renouveler en Espagne la mystification d’un parti conservateur progressiste, est morte de sa belle mort entre les dédains de la majorité et la froideur de l’opposition proprement dite Celle-ci n’a pas jugé à propos de se passionner pour des hommes qui la désavouent tout en attaquant le gouvernement. Elle a préféré réserver ses forces pour la discussion des budgets.

Cette discussion doit, dit-on, provoquer d’assez violens orages, l’issue n’en est pas d’ailleurs douteuse. Envisagée isolement et abstraction faite des nécessités dont il subit le contre-coup, le projet de bugdget pour 1850 n’est assurément pas un chef-d’œuvre à part quelque économies sur le chapitre de la guerre, ce n’est qu’au moyen de fortes retenues sur les traitemens des employés et des officiers en activité ou en retraite que M. Bravo Murillo est parvenu à équilibrer les recettes et les dépenses ; mais si précaires, si onéreux même, à beaucoup d’égards, que soient ces expédiens, il faut bien s’en tenir là, tant qu’on ne sera pas parvenu à accroître les recettes et à diminuer les frais de perception Toute la question est de savon si le ministère travaille sérieusement à amener ces deux résultats, et sa sollicitude n’est pas à cet égard douteuse.

Une nouvelle qui déroute bien des prévisions et qui coupe court à bien des éventualités tient depuis quinze jours en émoi Madrid et l’Espagne entière. Voilà ce qu’on nous écrit à ce sujet : « La grande nouvelle du jour est la grossesse de la reine. Quoique, d’après l’étiquette reçue, la déclaration officielle n’en puisse être faite que le cinquième mois, le roi, ne pouvant contenir sa joie, a donné connaissance de l’heureux événement au duc de Valence, qui, avec la permission de sa majesté, s’est empressé de communiquer la nouvelle à ses collègues. Le conseil des ministres a été ensuite admis à présenter ses félicitations aux augustes époux, qui les ont reçus avec des marques toutes particulières d’estime et d’amitié. Le roi a fait faire, par son peintre de la chambre, M. Lopez, un magnifique portrait du duc de Valence, et l’a fait placer dans son cabinet de travail.

« Vous avez dû apprendre presque en même temps la présentation et le rejet de la proposition sur les incompatibilités parlementaires, émanée de l’opposition modérée. Cette opposition modérée constitue un de ces partis dont on a dit qu’ils tiennent sur un sofa. Elle se réduit à neuf membres bien comptés, que des désappointemens d’ambition ont amenés à déserter le drapeau ministériel. Tous ces messieurs ont voulu, ni plus ni moins, être ministres ; presque tous occupent des emplois élevés. L’un, M. Rios Rosas, aspirait à la présidence du congrès ; un autre, M. Moron, est à la tête d’une oligarchie de clocher qui s’est formée à Valence. Ce parti na pas de théories fixes ; il ne compte pas sur les progressistes. Aussi il ne fait pas de prosélytes, et n’inspire aucune inquiétude aux ministres. »