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vent de Jesus-Maria, célèbre depuis long-temps par les miracles qu’elle prétendait faire et par les plaies de ses mains, imitées de celles du Sauveur : c’est elle qui faisait croire au roi qu’elle avait des révélations, et que c’était la volonté de Dieu qu’on fît tomber le ministère et le système constitutionnel ; elle ne voulait pas absolument se laisser prendre, et il a fallu employer l’autorité du nonce de sa sainteté pour vaincre sa résistance ; — D. Martin Rodon, secrétaire du roi ; — les gentilshommes de la chambre du roi Melgar, Baena et Quiroga, celui-ci frère de sœur Patrocinio. Le père Fulgencio et la religieuse sont partis sous escorte : le premier pour son couvent d’Archidona, en Andalousie, la seconde pour un couvent de Badajoz. Les autres sur différens points de la péninsule.

Ainsi a fini cette farce ridicule qui, prolongée un jour de plus, aurait pu être féconde en conséquences. On est autorisé à croire que la très forte garnison de Madrid ne serait pas restée passive. Par suite des événemens du 20, on a jugé convenable de faire abandonner au roi le gouvernement du palais et du patrimoine de la couronne dont il était depuis quelques mois investi. Ces attributions sont désormais transportées au ministère d’état. Le roi ne s’est pas prêté de bon gré à cet arrangement et, pour montrer son dépit, il a fait faire ses préparatifs de voyage pour le Pardo. Le général Narvaez, instruit de cette résolution, s’est rendu chez le prince, avec qui il a eu une longue entrevue, et l’ordre de départ a été révoqué. Tout est calme maintenant dans les hautes régions, et les ministres ont dîné avec le roi et la reine en signe de réconciliation. Les fonds, publics qui avaient baissé, le 20, jusqu’à 23 et quart s’élevaient, le 25, à 27 et demi, et la tranquillité la plus parfaite régnait dans Madrid.


AFFAIRES DE BUENOS-AYRES.

Est-ce donc une guerre éternelle que nous avons résolu de mener sur les rives de la Plata ? Depuis bientôt douze ans qu’elle est allumée, qu’avons-nous gagné, soit en honneur, soit en crédit, soit en garanties ? Où est le prix du sang versé par nos marins, la compensation des sacrifices de notre commerce, le dédommagement des dépenses faits par le budget de l’état ? Le renom de la France a-t-il grandi en Amérique ? Quelle extension y a prise notre influence ? Notre navigation s’y est-elle accrue ? Nos manufactures y ont-elles obtenu de nouveaux débouchés ? Bien des amiraux ont passé dans cette question, et des consuls, et des plénipotentiaires : eh bien ! a-t-elle fait un seul pas en avant ? Sait-on mieux ce qu’on veut et surtout ce qu’on peut ? Étrange affaire, où la France et son gouvernement ont été constamment entraînés contre leur gré, en dépit de leurs ordres, par les agens chargés de les exécuter ! L’heure n’est-elle pas venue, enfin, de saisir la nation elle-même de cette grande question ? Ne faut-il pas la poser devant le pays, consulter le vœu national, avant de briser le pacte qui vient de s’interposer entre tous les partis en armes, avant de nous rejeter dans une guerre interminable ? car on dit que telle est la pensée du