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et dansèrent à la lueur des flammes[1]. Ce fût en vain que quelques habitans demandèrent qu’il leur fût permis d’éteindre les : flammes ; ce fut en vain qu’un ordre dérisoire, arraché par les instances des alcades, fut donné dans ce sens. Les charpentiers, qui s’étaient offerts, bien loin de se voir escorter, furent maltraités, contraints d’indiquer les maisons où le pillage devait être le plus lucratif, et forcés de s’enfuir pour sauver leur vie. Ainsi, pendant que la cite brûlait d’un côté, le viol, le meurtre, continuaient de l’autre. Le manifeste cite ici les noms de quelques-unes des victimes les plus remarquables, et parmi elles on voit figurer des magistrats et des prêtres.

Pendant toute la nuit, les portes de Saint-Sébastien avaient été fermées. Enfin, le jour parut, et, sur les vives instances des alcades, il fut permis aux habitans de quitter leur patrie en ruines. La plupart se hâtèrent de fuir. Une foule absolument sans ressources, des femmes entièrement nues, des vieillards couverts de blessures, s’échappèrent dans la campagne, où un grand nombre périrent. Quelques personnes restèrent, espérant que, la première soit de pillage apaisée ; elles pourraient sauver les débris de leur fortune ; mais l’incendie durait toujours, et, quand les alliés crurent n’avoir plus rien à prendre, ils trouvèrent que les flammes allaient trop lentement. Alors ils eurent recoure à des cartouches incendiaires qu’on leur vit préparer ouvertement dans la rue de Narrica[2]. Grace à l’emploi de ces artifices destructeurs, le feu se propagea avec une effrayante activité. Saint-Sébastien tout entier fut détruit. Trente-six maisons demeurèrent seules debout, la plupart adossées aux rochers du Castillo qu’occupaient les Français, les autres attenantes aux deux églises qui servaient d’hôpital et de caserne aux vainqueurs. Livres, registres publics et privés, archives civiles et ecclésiastiques, tout fut réduit en cendres, et l’on évalua à plus de 100 millions de réaux[3] les pertes immédiates résultant de cette épouvantable agression.

Les troupes qui étaient montées à l’assaut ne prirent pas seules part

  1. « Qual podria ser este suerte quando… y quando ardio la ciudad habiendola pegado fuego los aliados por la casa de Soto en la calle mayor… Quando olras casas fueron inceudiadas igualmente por los mismos. »
    « … Pues hubo quienes despues de haver incendiado a las tres de la madrugada de primero de septiembre una casa de la calle mayor, baylaron a la luz de las llamas. » (Manifesto.)
  2. « Quando se creyo concluida la expoliacion parecio demasiado lento el progreso de las llamas y ademas de los medios ordinarios para pegar fuego que antes practicaron los aliados, hicieron uso de unos mixtos que se habian visto preparar en la calle de Narrica en unas cazuelas y calderas grandes, desde las quales se vaciaban en unos cartuchos largos. De estos se valian para incendiar las casas con una prontitud asombrosa » (Manifesto.)
  3. Environ 27,500,000 francs.