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qui amenaient ce merveilleux résultat ; et, tandis que mon œil épiait les moindres modifications appréciables, tandis que ma main ébauchait ou terminait les dessins destinés à les reproduire, je sentais et presser dans mon esprit toutes les grandes questions de philosophie naturelle que soulève l’embryogénie. Tracer ici le tableau complet des problèmes posés ou résolus par cette étude serait et trop difficile et trop long. Arrêtons-nous à ceux qui surgissent tout d’abord devant les premiers rudimens d’une organisation qui commence. Demandons-nous d’où vient le germe du nouvel être, quelle loi générale préside à son développement, quel est le rôle probable des deux élémens qui, presque toujours, interviennent pour assurer la perpétuité des espèces, et bardons-nous bien dans cette recherche de séparer les plantes des animaux ; car, dans les deux règnes, la matière brute, mise en œuvre par la vie, s’élève jusqu’à l’organisation sous l’empire des mêmes lois.

Tout titre vivant vient d’un oeuf. — omne vivum ex ovo, — a dit je ne sais lequel de nos prédécesseurs. S’il fallait entendre par ce mot quelque chose de toujours identique et plus ou moins semblable à l’oeuf de poule, la fausseté de cet aphorisme serait évidente. Le végétal se multiplie par graines, par bourgeons, par bulbilles, par boutures… ; les animaux nous présentent des faits tout pareils. Prenez une de ces hydres d’eau douce si communes dans nos étangs, coupez-la par morceaux, et, au bout de quelques jours, chaque fragment sera redevenu une hydre complète. Observez-la dans un vase où vous aurez jeté pour la nourrir des larves d’insecte ou des naïs, et vous la verrez tantôt pondre des neufs recouverts d’une coque solide, tantôt pousser des boutons qui grandissent, s’organisent de plus en plus et deviennent bientôt une petite hydre pourvue de tous ses organes. D’abord adhérente à la mère et en communication directe avec elle, cette nouvelle venue vit tout-à-fait en parasite ; elle est comme un rameau trop jeune qui tire toute sa nourriture du tronc. Au bout de quelques jours, quand la bouche est ouverte, quand les bras se sont allongés, la petite hydre fait la chasse de son côté et contribue à l’entretien général : c’est le rameau dont les feuilles plus développées puisent dans l’atmosphère leur part de principes nutritifs. Celui-ci, il est vrai, ne quitte jamais la tige qui lui donne naissance ; l’hydre, au contraire, devenue assez forte, se sépare du corps qui l’a nourrie, et mène à son tour une vie entièrement indépendante.

Entre la graine proprement dite qui reproduit le végétal et le bourgeon qui se développe en rameau, on trouve chez certaines plantes une espèce d’intermédiaire : c’est le bulbille. Celui-ci ressemble au bourgeon ordinaire par sa composition ; mais, comme la graine, il peut se détacher du végétal, se développer isolément et donner naissance à un nouvel individu. Eh bien ! les animaux nous montrent de même des corps reproducteurs qui tiennent à la fois du bouton par