Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 5.djvu/845

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des ordres, et qu’il veut borner la réforme à de certaines limites. Si la suppression des banalités sans titre et des corvées abusives est accordée au tiers, il n’est point répondu à son vœu pour l’affranchissement des main-mortables[1]. Le temps des campagnes libres n’était pas venu, celui des villes libres, était passé. Ce n’est qu’en termes évasifs que l’ordonnance répond à la demande d’émancipation du régime municipal, et elle décrète spontanément l’uniformité de ce régime ; elle veut que tous les corps de ville soient réduits, autant que possible, au modèle de celui de Paris[2]. À ces tendances vers l’unité, elle en joint d’autres non moins fécondes pour le développement national. Elle introduit dans l’armée le principe démocratique par la faculté donnée à tous, de s’élever à tous les grades ; elle relâche pour la noblesse les liens qui, sous peine de déchéance, l’attachaient à la vie oisive ; elle attire la haute bourgeoisie de l’ambition des offices vers le commerce ; elle invite la nation tout entière à s’élancer dans les voies de l’activité :

« Le soldat par ses services pourra monter aux charges et offices des « compagnies, de degré en degré, jusques à celui de capitaine ; et plus avant s’il s’en rend digne.

« Pour convier nos sujets de quelque qualité et condition qu’ils soient de s’adonner au commerce et trafic par mer, et faire connoître que notre intention est de relever et faire honorer ceux qui s’y occuperont, nous ordonnons que tous gentilshommes, qui, par eux ou par personnes interposées, entreront en part et société dans les vaisseaux, denrées et marchandises d’iceux, ne dérogeront point à noblesse… et que ceux qui ne seront nobles, après avoir entretenu cinq ans un vaisseau de deux à trois cents tonneaux, jouiront des privilèges de noblesse, tant et si longuement qu’ils continueront l’entretien dudit vaisseau dans le commerce, pourvu qu’ils l’ayent fait bastir en notre royaume et non autrement : et en cas qu’ils meurent dans le trafic, après l’avoir continué quinze ans durant, nous voulons que les veuves jouissent du même privilège durant leur viduité, comme aussi leurs enfants, pourvu que l’un d’entre eux continue la négociation dudit commerce et, l’entretien d’un vaisseau par l’espace de dix ans. Voulons en outre que les marchands grossiers qui tiennent magasins sans vendre en détail ou autres marchands qui auront esté eschevins, consuls ou gardes de leurs corps, puissent prendre la qualité de nobles, et tenir rang et séance en toutes les assemblées publiques et particulières immédiatement après nos lieutenans-généraux, conseillers des siéges présidiaux, et nos

  1. Odonnance de 1629, art. 206 et 207 – Voyez plus haut l’analyse du cahier de 1615.
  2. Ordonanance de 1629, art. 412.