Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 6.djvu/25

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

par la conspiration de Gamarra : cet homme était le général Santa-Cruz, devenu président de la Bolivie, et qui offrait à Orbegoso de le soutenir contre Gamarra. L’ambition du général Santa-Cruz n’était pas tout-à-fait une ambition frivole. Il y avait chez lui un talent d’organisation qui semblait répondre à tous les besoins de la société péruvienne. La présidence de la Bolivie ne suffisait pas à Santa-Cruz, il lui fallait un plus vaste théâtre, et Lima seul pouvait le lui offrir.

Orbegoso hésita long-temps avant de répondre aux avances de Santa-Cruz. La guerre civile commença même avant toute intervention des Boliviens. Le lieutenant de Gamarra, le général San-Roman, battit sous les murs d’Aréquipa (2 avril 1834) le général Nieto, qui commandait dans cette place une division pour Orbegoso. Le général Nieto avait imploré, mais trop tard, le secours de Santa-Cruz. Orbegoso, qui était sorti lui-même de Lima à la tête de ses troupes, n’avait guère été plus heureux contre un complice de Gamarra, le général Bermudez. La révolution menaçait donc de triompher sur tous les points, quand il se fit un revirement inattendu, et comme on n’en voit qu’au Pérou. Le corps d’armée que commandait Bermudez, immédiatement après avoir vaincu Orbegoso, se déclara en faveur de celui-ci, et alla même jusqu’à lui livrer son général, qui fut exilé. Un autre corps révolté, sous les ordres du colonel Guillen, suivit cet exemple ; la ville du Cusco se soumit à son tour, et Orbegoso, revenu à Lima, put de nouveau croire son pouvoir mieux affermi que jamais. Un décret de bannissement à perpétuité fut lancé contre Gamarra et San-Roman. Santa-Cruz n’avait pas trouvé l’occasion d’intervenir ; il se consola aisément, car il savait que, cette occasion s’offrirait tôt ou tard.

Orbegoso cependant pouvait se faire quelque illusion sur la portée de son triomphe. Tout, en effet, semblait indiquer un retour à la tranquillité, à la confiance. Le 19 juin 1834, une nouvelle constitution fut proclamée ; l’effectif de l’armée fut considérablement réduit. Ce ne fut là qu’une courte trêve. La guerre qui devait suivre cet armistice devait avoir, pour le Pérou, des conséquences plus graves qu’aucune des crises précédentes.

Le signal de cette guerre fut donné par une insurrection qui éclata à Puno, et qui obligea le président à réclamer des pouvoirs extraordinaires. Investi de ces pouvoirs, Orbegoso quitta Lima le 10 novembre et se dirigea vers le sud. Le voyage d’Orbegoso ne servit malheureusement qu’à provoquer de nouvelles conspirations. Dès le 1er janvier 1835, la garnison du Callao se soulevait et proclamait le général Lafuente. Ce mouvement, qu’on n’eut pas de peine à réprimer, ne fut que le prélude d’une insurrection plus redoutable. Parmi les lieutenans qu’Orbegoso avait laissés à Lima se trouvait le colonel Salaberry. Cet officier jouissait de toute la confiance du président : il était loin