Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 6.djvu/51

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

V

Une ère nouvelle allait enfin s’ouvrir pour le Pérou. Après tant de révolutions, le pays fatigué se repose, depuis quelques années du moins, sous une main plus ferme et une administration plus intelligente. Le général Castilla, qui n’est qu’un brave soldat, a eu la sagesse d’appeler auprès de lui des hommes capables et expérimentés, afin de pouvoir s’aider de leurs conseils et s’entourer de leurs lumières. On n’ose cependant entrevoir sans inquiétude le moment où le président du Pérou, qui, aux termes de la constitution nouvelle, n’est pas rééligible, devra remettre le pouvoir à un successeur moins heureux peut-être que lui. L’Amérique républicaine du Sud devrait pourtant être bien dégoûtée des révolutions. Que lui ont rapporté ces pronunciamientos de tous les jours dont le récit attriste les premières pages de son histoire ? Du sang répandu, des finances obérées, des existences détruites et la prospérité même du pays compromise ; puis des constitutions qu’un congrès improvise et qu’un décret abolit : feuilles inutiles dont le nom peut tout au plus servir de jouet à des peuples enfans qui ne le comprennent même pas. Le Pérou seul a déjà eu tant de constitutions depuis vingt-cinq ans, que lui-même en sait à peine le nombre. Je me bornerai à indiquer les principales dispositions de celle qui le régit aujourd’hui, et qui fut proclamée par le congrès assemblé à Huancayo après la chute de Santa-Cruz.

À la tête de l’état est un président élu pour six ans et chargé du pouvoir exécutif. À côté de lui, un conseil d’état, siégeant en permanence, prépare les lois, et son président remplace le président de la république en cas d’absence ou de maladie.

Le congrès, composé de deux chambres, le sénat et la chambre des députés, est nommé au suffrage universel et s’assemble tous les deux ans. Les sessions durent à peine quelques mois. Le président les ouvre en personne par un court exposé de la situation du pays, que chaque ministre développe plus tard dans un rapport imprimé et soumis aux membres du congrès. Le congrès vote ensuite les lois qui lui sont proposées, ratifie les traités de commerce et de paix, et s’occupe des questions d’intérêt majeur qui lui sont présentées. Pour tout le reste, le pays s’en rapporte au pouvoir exécutif, qui de fait est encore beaucoup plus puissant que la lettre de la constitution ne le laisserait supposer.

La république est divisée en départemens, à la tête desquels est un préfet, chef militaire et administratif à la fois. Il a sous ses ordres le