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paraît intéressant d’exposer ce que nous avons pu recueillir d’éclaircissemens relatifs à la disposition matérielle de leurs représentations, à la plus ou moins grande perfection de leur jeu, et enfin à ce qu’il est permis de conjecturer de la composition de leur répertoire.


IV. – DIMENSIONS ET STRUCTURE DES MARIONNETTES ANCIENNES.

Il est regrettable que les écrivains de l’antiquité ne nous aient pas transmis plus de détails sur les jeux de marionnettes, particulièrement sur les représentations données à Athènes dans l’hiéron de Bacchus. Faute de témoignages, nous sommes obligé, pour reconstruire ces spectacles dans notre pensée, de recourir à des inductions dont la meilleure n’a pas, nous le savons bien, la valeur du plus petit monument ou l’autorité d’une seule ligne de texte. Essayons cependant.

Lorsqu’on se rappelle que les acteurs d’Eschyle et de Sophocle étaient eux-mêmes à moitié de bois, montés sur des espèces, d’échasses, ayant des avant-bras postiches et les mains agrandies par des rallonges de bois ; quand on songe qu’après la défaite de Chéronée, la ruine des finances publiques et la détresse des particuliers obligèrent, suivant un habile archéologue[1], les magistrats à permettre aux choréges d’introduire quelques mannequins dans les choeurs, pour compléter à moins de frais le nombre voulu, on est un peu moins surpris de voir les comédiens de bois tolérés en un lieu où l’on avait applaudi naguère tant et de si admirables chefs-d’œuvre. Ce ne fut pas d’ailleurs sur la scène, comme le dit Athénée, mais très certainement sur l’orchestre ou sur le thymélé que les marionnettes, à l’exemple des hilarodes, des éthologues et des mimes grecs de tous genres, ont dû donner leurs représentations, et encore, pour que du conistra, le point de l’orchestre le plus rapproché des gradins, la finesse de leur jeu pût être appréciée des spectateurs assis sur les bancs du coilon, fallait-il que leur taille fût à peu près de grandeur naturelle. Hérodote nous a appris que les statuettes funèbres qui figuraient dans les repas égyptiens avaient une et jusqu’à deux coudées de hauteur ; mais aucun écrivain ne nous a rien appris, que je sache, sur les dimensions des marionnettes théâtrales. La plus grande des poupées grecques et romaines dont nous avons parlé est une de celles qui ont appartenu au comte de Caylus, et que possède le Cabinet des médailles ; elle a dix-huit centimètres de haut[2]. Il est vrai que j’ai vu dans le portefeuille des dessins d’antiquités de M. Muret deux cuisses de poupée d’ivoire (trouvées dans un cimetière de Rome, et d’un assez bon travail) dont les dimensions

  1. Boetti., Furien-maske, num X
  2. La plus petite des poupées conservées au Cabinet des médailles a six centimètres.