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assez long-temps avec succès Figaro directeur de marionnettes. En 1786, ces pantins furent remplacés par des enfans, qui faisaient les gestes sur le théâtre, tandis que de grandes personnes parlaient et chantaient pour eux dans la coulisse[1]. On joua de la sorte plusieurs opéras-comiques, composés par des musiciens distingués. Pour achever ce qui a rapport aux comédiens de bois de M. le comte de Beaujolais, je dois dire qu’ils furent tirés un moment de leur oubli en 1810. Cette résurrection éphémère a été racontée par un spirituel contemporaine : « A la fin de 1810, dit M. Dumersan, Mme Montansier fit débuter au Palais-Royal une troupe de danseurs de corde, puis les Puppi napolitani ou marionnettes napolitaines. Il y avait un directeur italien, qui s’étonnait de n’attirer que des enfans, tandis qu’en Italie les spectacles de marionnettes sont suivis par des hommes de tous rangs et de tout âge… On admirait pourtant Pulcinella que le directeur dirigeait lui-même et qui avait l’air d’un personnage vivant. Ce théâtre prit un peu après (le 20 octobre ; 1810), le titre de Théâtre des jeux forains. L’ouverture se fit par un prologue de Martainville intitulé la Résurrection de Brioché : Cette pièce fut jouée par les ci-devant comédiens de bois du comte de Beaujolais, qui dormaient dans les greniers du théâtre depuis vingt ans. Ces automates, grands comme des enfans de huit ans et habillés à la Pompadour, eurent peu de succès[2]… »

Le 1er janvier 1785, les fantoccini de M. Caron, qui, pendant quelques mois, s’étaient montrés sur le boulevard du Temple, s’établirent dans une salle au Palais-Royal, sous le nom renouvelé de Théâtre des Pygmées. Les deux pièces d’ouverture, d’aune teinte trop uniformément mythologique, furent le Nouveau Prométhée, compliment ou prologue en un acte avec couplets, et Arlequin protégé par Momus, vaudeville en trois actes[3]. Caron conduisais lui-même ses marionnettes, parlait pour elles et composait presque toutes les pièces. Ces nouveaux fantoccini ne ressemblaient nullement à ceux qu’on avait si bien accueillis à la foire Saint-Ovide de 1776, et qui avaient au moins deux pieds de haut ; ceux-ci, au contraire, étaient d’une petitesse extrême[4]. Ils ne

  1. Petits spectacles de Paris,1789, p. 13.
  2. Mémoires de Mlle Flore, t. I, p.127 et suiv. Voyez encore le Mercure de novembre 1810, p. 35.
  3. Journal de Paris, 2 juillet 1785.
  4. Petits Spectacles de Paris 1786, p, 191-192. Les amateurs de curiosités ont recueilli quelques-unes de ces anciennes marionnettes des foires Saint-Germain et Saint-Laureut ; M. Dumersan, entre autres, possédait un vieux polichinelle que l’on a gravé dans le Ma gasin pittoresque de 1834, p. 117, en lui attribuant, à tort, la date de 1722. Le costume de ce pantin est celui du règne de Louis XVI. On m’assure que M. Taylor, membre d’un comité de secours pour les artistes dramatiques, s’est trouvé en rapport avec le dernier directeur des marionnettes de la foire Saint-Laurent, qui conservait précieusement sa troupe de bois dans des coffres qu’il consentit à ouvrir à l’ancien directeur de la Comédie-Française ; mais ce brave homme, malgré sa détresse, refusa de vendre à aucun prix ses anciens et chers compagnons.