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fait cela. –Ce n’est pas assez, dit-on ; il devrait faire davantage. Quoi donc ? et que pensez-vous que le président aurait dû ou devrait faire ? Vous savez donc ce qu’il y a à faire, et surtout comment il faut le faire ? Eh ! de grace, alors éclairez-nous ! Mais vous n’en savez rien, et c’est parce que vous n’en savez rien vous-mêmes que vous voulez que les autres le sachent ! Dire que le président s’est tenu sur la réserve, qu’il a parlé de manière à ne pas s’engager, c’est dire que la situation est très obscure et très compliquée. Eh ! qui en doute, bon Dieu ? Avez-vous quelque secret pour l’éclaircir ? Non ! C’est pour cela que vous en demandez un au président, qui nous répond par le vieux proverbe : « Aide-toi, Dieu t’aidera ! »

Quant à nous, au lieu de dire que le président a été trop retenu et trop réservé dans son langage, nous le louerons d’avoir été très franc et très net. Nous ne mettons point sur le compte de ses paroles les obscurités et les brouillards de la situation. Oui, en disant qu’il était prêt à l’abnégation comme à la persévérance, en déclarant par conséquent qu’il acceptait tout au moins la rééligibilité, le président a dit tout ce qu’il pouvait dire à côté de la constitution de. 1848 ; il a été jusqu’où il pouvait aller.

Le voyage du président a été la grande affaire de cette quinzaine. Jetons maintenant un rapide coup d’œil sur l’extérieur.

À peine sortie de la crise qu’il a plu à lord Palmerston de lui faire subir, la Grèce se remet de son trouble, et semble même s’être retrempée dans cette dernière épreuve. Bien que l’époque, des élections soit très prochaine, la situation générale du pays est redevenue assez calme pour que le roi Othon, dont la santé, légèrement altérée par le climat et les soucis de sa laborieuse royauté, exigeait un peu de repos, ait pu songer à faire un voyage en Bavière. Quelques actes d’une importance réelle ont précédé son départ. La reine Amélie a été proclamée régente par la chambre des députés et le sénat. Les organes légaux du pays ont compris à merveille que des mains royales pouvaient seules accepter la couronne en dépôt et préserver le peuple grec, pendant l’absence de son souverain, des dangers que tout autre mode de régence n’aurait pas manqué de faire naître. Compagne intelligente et, dévouée du roi, la reine Amélie possède les qualités du rôle qu’elle a à remplir, et c’est pour cela, sans doute, qu’une petite fraction, que l’on ne saurait plus appeler un parti depuis que l’amiral Parker et M. Wyse ont rendu à la Grèce le service d’y annuler l’action de la diplomatie anglaise, se donne l’innocent plaisir de crier à la violation de la charte. Gens pratiques par excellence ; les Grecs n’ont pas de scrupules devant la nécessité, et la régence de leur jeune et gracieuse souveraine leur a semblé aussi légale qu’elle était indispensable.

Un autre événement fort grave pour la Grèce consiste dans la reconnaissance de son église nationale par le patriarche de Constantinople. Cette question traînait depuis-1833, et sa solution, vivement souhaitée au double point de vue de la paix des consciences et de l’indépendance politique du nouveau royaume, rencontrait de grandes difficultés qui n’étaient pas toutes à Constantinople. Le patriarche, nommé par le sultan, est ordinairement désigné par le cabinet de Saint-Pétersbourg, et il ne paraissait pas indifférent à la politique russe, soit d’exercer son influence en Grèce à l’aide d’un clergé soumis au siège épiscopal de Constantinople, soit de troubler, au besoin, l’esprit du peuple hellène par la menace d’un schisme. La reconnaissance du saint-synode