une telle somme, espérer quelque chose de plus. J’aime à penser que MM. Reiset et Villot, chargés d’une mission pareille à celle qu’ils viennent de remplir, ne témoigneront plus pour les Pérugin la même avidité, et réserveront les deniers de l’état pour des maîtres plus habiles et plus importans.
G. PLANCHE.
— À la fin de chaque année, on voit refleurir une branche de littérature qui, dans sa frivolité apparente, n’est ni sans charme ni même toujours sans utilité réelle. C’est alors que reparaissent en foule ces livres illustrés, ces brillans volumes destinés à plaire aux yeux, tout en parlant à l’esprit. Autant l’alliance du dessin et de la parole est regrettable quand la pensée se sacrifie et se subordonne aux exigences vulgaires de l’ornementation matérielle, autant elle mérite d’être encouragée quand elle n’a d’autre but que de populariser des idées saines, des notions utiles, ou d’accuser plus nettement le côté pittoresque de certaines œuvres essentiellement descriptives. C’est à cette dernière catégorie qu’appartient, par exemple, le Voyage autour de mon jardin, de M. Alphonse Karr[1]. Il est superflu de remarquer que le cadre ici n’est pas nouveau, et que le Voyage de M. Karr se rattache à une famille d’écrits dont un livre bien connu de Xavier de Maistre reste le type inimitable. Quoi qu’il en soit, il y a, dans le Voyage autour de mon jardin, un dilettantisme d’horticulteur assez amusant, d’agréables, bien qu’un peu futiles causeries ; il y a aussi une suite de dessins où l’on retrouve toute la finesse, toute la vivacité de crayon qui distinguent les Gavarni et les Meissonnier. Parmi les publications de ce genre qu’on a vu récemment se produire, toutes ne relèvent pas, au reste, de la pure fantaisie. Il en est qui s’offrent comme d’utiles auxiliaires à l’enseignement, comme d’aimables guides pour la jeunesse, et, dans cet ordre de travaux plus particulièrement recommandables, on peut en signaler qui s’adressent à tous les âges. C’est ainsi que, dans le Voyageur de la jeunesse, de MM. Champagnace et Olivier[2], nous trouvons réalisée et continuée, d’après un plan nouveau, l’idée d’un écrivain modeste et justement estimé, Pierre Blanchard. MM. Champagnac et Olivier ont voulu donner, sous une forme claire et attrayante, le résumé exact et complet des notions géographiques telles que les ont fixées les plus récentes relations. Ils ont voulu aussi que ce résumé eût tout le charme d’un Tableau, d’un récit, et que ce fût, pour ainsi dire, comme l’histoire d’un long voyage au milieu des divers pays et des diverses sociétés. Ils ont atteint leur but, et la génération de lecteurs à laquelle ils se sont surtout adressés leur devra non-seulement de connaître la géographie et l’histoire, mais encore de les aimer. Nous avons remarqué, dans les chapitres consacrés aux pays lointains, à l’Afrique, à l’Océanie, au Nouveau-Monde, le soin avec lequel les auteurs se sont appliqués à varier, à compléter sans cesse l’étude de la nature par l’étude des mœurs. On ne peut qu’encourager de telles publications. N’y trouve-t-on pas, en effet, l’indice d’un sentiment qu’on voudrait voir se développer ou plutôt se ranimer en France, celui de l’importance des études géographiques et de la salutaire influence qu’elles pourraient exercer dans notre pays ?
V. DE MARS.