Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 8.djvu/968

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
962
REVUE DES DEUX MONDES.

non plus entre l’Autriche et la Prusse, mais contre l’une et l’autre par la démagogie ; — il n’en est pas moins vrai que c’est l’armée de l’ordre qui veut aujourd’hui entrer en campagne, parce qu’il n’y a pas d’ordre possible sur des bases durables dans un grand pays dont l’honneur est entamé.

Comment la Prusse sauvera-t-elle son honneur ? Toute la question est là, une question capitale pour l’Europe entière, et cependant soumise d’heure en heure aux variations des circonstances accidentelles et des caractères particuliers. Le discours par lequel le roi Frédéric-Guillaume a ouvert son parlement portait l’empreinte trop fidèle des irrésolutions de son ame, et la guerre en pouvait sortir aussi bien que la paix. L’adresse préparée maintenant dans les chambres en réponse au discours de la couronne exercera sans doute une dernière influence sur la situation. Peut-être même la question sera-t-elle plus sommairement tranchée dans un sens plus sûr. D’après les plus récentes nouvelles, au moment même où la guerre pouvait éclater en quelque sorte à chaque minute, les espérances de paix reprenaient du crédit dans les cercles bien informés. M. de Prokesch, qui, après son ultimatum signifié, se préparait à quitter Berlin, et n’avait plus qu’à user de ses pleins pouvoirs pour faire avancer les troupes, n’était point encore parti le 27. La veille était arrivée une dépêche télégraphique de Vienne, apportant la réponse du prince Schwarzenberg à la demande précipitée de M. de Manteuffel. Le ministre autrichien a accepté l’entrevue qu’on lui proposait à Oderberg, et M. de Manteuffel s’y est rendu tout de suite. Le bruit courait à Berlin que l’Autriche consentait à ce qu’on réglât dans les conférences libres les difficultés du Schleswig-Holstein et de Cassel. Nous faisons des vœux sincères pour que ce retour des puissances vers la paix soit bientôt confirmé par quelques nouvelles plus authentiques.

Cette réconciliation avec la Prusse, si elle peut encore s’accomplir, amènerait sans doute aussi une sorte de détente dans les relations de l’Autriche avec le Piémont, et l’ensemble de la situation européenne se ressentirait de cet adoucissement simultané dans la direction diplomatique du cabinet de Vienne. Toutes les injures auxquelles le nouveau gouvernement piémontais est en butte ne réussiront jamais auprès des hommes de bonne foi à transformer le Piémont en un état révolutionnaire. Le discours par lequel le roi Victor Emmanuel vient d’inaugurer la session parlementaire est aussi mesuré qu’il est ferme. Au sujet de la triste querelle engagée avec Rome sur la loi Siccardi, le programme du cabinet piémontais se réduit à ces deux mots significatifs : Respect du saint-siège et indépendance de la législation nationale. Il faut espérer que la chambre des députés, qui montre d’ailleurs les dispositions les plus favorables, saura donner à l’Italie ce noble spectacle dont le jeune roi parlait avec émotion, « l’exemple d’un peuple qui, au milieu de tant d’actes de destruction, sache avoir le courage et le bon sens de construire. »

Alexandre Thomas.


THE MISER’S SECRET or the Days of Jame the First : — An Historical