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I. – SITUATION FINANCIERE.

Abordons maintenant la situation de la France. Quand on envisage d’un coup d’œil impartial et sûr les résultats de l’année 1850, on reconnaît que cette période marque un progrès dans la gestion de la fortune publique aussi bien que dans le développement de la fortune privée, Assurément l’agriculture, qui est la grande industrie de la nation française, a souffert de l’avilissement qui continue à se faire sentir dans le prix des denrées ; cependant le marché anglais a ouvert aux produits de nos champs et de nos vergers un débouché très important et qui absorbe, en grains seulement 3 à 4 millions d’hectolitres. C’est comme si la France avait 2 millions de consommateurs de plus à nourrir. En même temps l’assemblée nationale, d’accord avec le pouvoir exécutif, a réduit de 17 centimes, pour l’année 1851, les charges supportées dans l’intérêt de l’état par la propriété foncière. Il y a là de quoi réconcilier grands et petits propriétaires avec une situation dont le bien est l’œuvre des pouvoirs établis, dont le mal tient à l’instabilité anarchique, organisée à l’état d’institution par les constituans de 1848.

L’industrie manufacturière a déployé, en 1850, une activité sans exemple depuis longues années, et elle a joui d’une prospérité sans mélange. — Paris, Lyon, Saint-Étienne, Mulhouse, Rouen, Elbeuf, Reims, Sedan, Limoges, Amiens, Saint-Quentin et Roubaix n’avaient jamais fait de plus brillans bénéfices. Le bas prix des denrées a concouru, avec l’élévation des salaires, à améliorer la condition des ouvriers. Pour cette classe de citoyens plus encore que pour toutes les autres, les privations ont cessé, les désastres de la veille ont été réparés, et l’on a pu songer encore une fois au lendemain, Depuis le 1er janvier 1850, nous voyons s’accroître d’environ 5 millions par mois, le fonds des caisses d’épargne. Après avoir épuisé les conséquences du désordre, les ouvriers ont éprouvé au plus haut degré des bienfaits de l’ordre ; la Providence a voulu, sous ces deux formes leur prodiguer la lumière des mêmes enseignemens.

Sans doute tous les ateliers n’ont pas participé au mouvement dans une égale mesure. Les industries qui ont besoin de compter sur l’avenir pouvaient difficilement prendre l’essor. Les travaux de construction, les armemens de long cours et les entreprises de chemins de fer n’ont retrouvée qu’une faveur médiocre. Cependant la métallurgie, entièrement paralysée en 1848 et en 1849, a recommencé à vendre et par conséquent à produire. Le prix des bois s’est relevé. Après les objets de grande consommation, les articles de luxe ont été recherchés au-delà de toute espérance. Il s’est manifesté dans l’ordre