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blancs, dont nous avons assez parlé, qui ne jurent que par le droit divin de la république ou par le droit divin de la royauté. Il y en aura qui la marchanderont, ceux par exemple qui voudraient de bonne foi qu’on retirât la loi du 31 mai avant de nommer la nouvelle constituante, comme si les ordonnances du gouvernement provisoire d’où sortait la constituante de 1848 étaient pour la qualification du droit électoral un titre plus haut et plus sacré que la loi solennellement votée par la majorité des représentans de la France. D’autres encore prétexteront qu’ils n’entendent point laisser des élections si importantes sous l’influence actuel le du pouvoir exécutif, comme si le gouvernement dominait à sa volonté les résultats du suffrage universel, comme si le gouvernement provisoire avait empêché les élections de la constituante qui l’a renversé, comme si le gouvernement du général Cavaignac avait empêché l’avènement du prince Louis Bonaparte à la présidence.

Ces objections tomber ont en leur temps devant la nécessité qui presse tout homme raisonnable de disputer de son mieux au hasard la conduite des événemens. L’évidence se fera. On comprendra que, pour tous les drapeaux dans cette mêlée où ils sont engagés, il n’y a plus de retraite honorable qu’à la condition de s’abriter derrière une injonction décisive de la volonté nationale. Orléanistes, ou légitimistes, bonapartistes ou républicains purs, tous ceux qui ne voudront pas déserter leur devoir de citoyen n’auront plus qu’à se ranger sous la loi qui édictée par une assemblée régulièrement investie d’un mandat spécial. Il n’y aura plus alors d’autre solution à chercher que celle qui aura été l’expression du vœu constitutionnel. Vienne la république, elle sera cette fois plus légale qu’on ne l’a pu faire au 4 mai 1848, lorsqu’il ne restait qu’à la sanctionner. Vienne la légitimité elle-même : elle n’en sera pas plus, il est vrai, un sacrement et un dogme ; elle sera un fait reconnu par la majorité de la nation, et à ce titre accepté de ceux même qui lui contesteraient la souveraine origine de ses droits antérieurs. À ce propos, nous ne pouvons passer sous silence la campagne inattendue que dirigent aujourd’hui, dit-on, en faveur de ces droits suprêmes, des hommes d’état très bien déguisés en journalistes.

Il n’avait d’abord été question de ce qu’on appelle la fusion qu’en assez petit comité. La fusion a cependant aujourd’hui un organe accrédité qui la représente devant le public et la recommande de la manière qu’on a cru la plus persuasive. Nous étant déjà exprimés avec franchise sur cet expédient politique, nous ne trouvons pas trop difficile de caractériser aussi sincèrement la position où ceux qui le prônent encore viennent de se placer.

Cette position est toute en deux points qui ne nous paraissent pas se prêter mutuellement beaucoup de force, et que l’on affaiblit plutôt l’un et l’autre en les soutenant tous les deux à la fois. On déclare que l’on se met en campagne pour convertir le pays à l’idée de la fusion : c’est le premier point ; mais on déclare aussi que l’on est, pour sa part, tout converti d’avance, en cas de besoin, à une idée pourtant très différente, à la prolongation des pouvoirs du président de la république : c’est le second point de la thèse. On ne s’est ainsi déterminé à planter solennellement le drapeau de la fusion monarchique qu’en accompagnant la cérémonie d’une réserve expresse ail bénéfice de la prorogation présidentielle, et il est à remarquer que dans la nuance où rentrent, par