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l’Association bretonne. Cette association, qui a pour directeur et pour secrétaire-général MM. de Blois et Vincent de Kerdrel, se divise en deux sections, l’une archéologique, l’autre, agricole ; et tandis que cette dernière s’applique, au nom du progrès scientifique et matériel, à lutter contre la routine agricole, l’autre, la section archéologique, s’occupe, au nom du progrès moral, de raviver les traditions de l’antique nationalité, de tirer de ses études des enseignemens sur les mœurs, les habitudes ; la foi des Bretons des vieux âges, pour présenter ces mœurs et cette foi comme modèles aux Bretons d’aujourd’hui. Il se cache peut-être une mordante épigramme et une triste vérité dans cette distinction tacite, que l’Association bretonne, en dédoublant ainsi ses travaux, établit entre la tradition et la routine. Dans la science, elle combat la routine, parce que la science a marché, et en morale elle invoque la tradition, parce qu’elle cherche peut-être en vain autour d’elle, dans le présent, ces doctrines qui élèvent et fortifient le caractère des peuples et les nobles exemples qui les excitent au bien.

La Touraine, le Maine, l’Anjou et le Poitou forment, au point de vue historique et archéologique, un centre moins actif sans doute que la Normandie, mais important encore, sinon par le nombre, du moins par la valeur des publications. Dans la Touraine, les archéologues pratiques et les collecteurs sont plus nombreux que les écrivains. À part M. Salmon, à qui l’on doit une curieuse publication sur les serfs de l’abbaye de Marmoutiers, et qui s’occupe activement d’une histoire générale de la province, et M. l’abbé Bourassé, auteur d’un Manuel d’archéologie chrétienne et de quelques monographies estimables, les érudits tourangeaux n’ont fourni, en fait de publications, qu’un assez faible contingent ; mais en revanche, il est peu de provinces où l’on ait apporté plus de soins pour conserver les débris du passé, ou pour faire revivre par d’heureuses imitations les arts du moyen-âge. C’est ainsi que, par des efforts vraiment surprenans et une persistance qui rappelle celle de Bernard de Palissy, MM. Avisseau et Landais sont parvenus à établir une fabrique de poterie dans le genre de celle à laquelle Bernard a donné son nom, et à égaler ce que la renaissance a produit de plus parfait dans ce genre. C’est ainsi encore que M. Chateignier, architecte d’Amboise, a construit dans la commune de Sainte-Catherine de Fierbois, d’après le système de l’architecture anglaise du XVe siècle, un château dont l’âge peut tromper l’œil le plus exercé, et que M. Guérin, de Tours, a bâti, pour le petit séminaire de cette ville, une chapelle, style XIIIe siècle, d’une élégance et d’une exactitude parfaites. Le public, qui aime et respecte les vieux monumens, soutient et encourage autant qu’il le peut le zèle des artistes, et la ville de Tours a acheté récemment, pour la faire restaurer, l’église de Saint-Julien, qui était devenue propriété particulière. Cette acquisition a été faite au moyen d’une souscription volontaire dont le chiffre s’est élevé à 80,000 francs, et à laquelle tout le monde a pris part.

Angers, comme Tours, a montré pour la conservation de ses monumens ou des documens de son histoire l’empressement le plus vif. Cette ville vient d’acquérir l’importante collection d’imprimés et de manuscrits que M. Toussaint Grille avait réunis sur l’Anjou ; elle en a fait imprimer le catalogue, et depuis le conseil-général a confié à M. Marchegay, archiviste du département, le soin de publier un recueil des documens angevins inédits, dont le premier volume