DE L’ALLEMAGNE.
Quand une littérature long-temps bouleversée par les passions révolutionnaires semble aspirer à quelque chose de meilleur et se cherche péniblement elle-même, c’est presque toujours par les travaux sérieux, c’est par l’histoire et la critique qu’elle se soustrait peu à peu aux influences perverses. Dans le désarroi général, les critiques et les historiens littéraires se trouvent naturellement chargés d’une mission grave, et pour peu qu’ils en comprennent l’importance et les devoirs, il ne saurait y avoir pour leur esprit de discipline plus féconde. À eux de maintenir les traditions, de garder le culte des souvenirs, de renouer sans prétention les liens rompus ; s’il s’agit d’une révolution nécessaire et que la société soit en marche vers de nouveaux rivages, à eux la tâche d’emporter aux bords inconnus la cendre et la mémoire des ancêtres. L’Allemagne est le pays de l’Europe où ce salutaire office de la critique est le plus manifestement indiqué. La vieille Allemagne est morte ; qu’une réaction imprudente essaie de la remettre sur ses pieds, que l’esprit féodal et les fantaisies mystiques de certains hommes d’état du Nord prétendent se substituer sans façon aux légitimes exigences du XIXe siècle, tout cela n’y fait rien ; l’ancienne Allemagne n’est plus, et il est impossible jusqu’à présent de deviner l’heure où s’organisera l’Allemagne nouvelle. Des difficultés de toute espèce, des pro-