lois sont constamment violées : au Japon, on les exécute. Au milieu de peuples qui ne connaissent d’autres mobiles que la crainte et l’intérêt, cette race plus vigoureuse offre le spectacle d’une société fondée à la fois sur le principe d’autorité et sur le point d’honneur. L’invasion européenne trouverait donc probablement au Japon plus d’obstacles qu’elle n’en a rencontré en Chine. Cependant, pour cet empire aussi, de grands événemens se préparent. Une circulation active s’opère aujourd’hui entre les ports de la Californie et ceux de l’extrême Orient ; le développement de ces relations auxquelles les ports du Japon seront bientôt nécessaires préoccupe déjà le gouvernement des États-Unis et ne peut manquer d’imprimer tôt ou tard une nouvelle énergie aux efforts de cette démocratie puissante, qui vient sans cesse, comme la vague de l’océan, battre les barrières qu’on lui oppose : Si d’ailleurs l’empire chinois se trouve un jour violemment jeté hors de son orbite, si ce colosse obéit enfin aux attractions qui le sollicitent, il est douteux qu’il soit donné au Japon de pouvoir continuer, seul et silencieux, à graviter ainsi à l’écart.
Tous ces membres de la même famille, Chinois, Cochinchinois, Coréens, ont, à un degré différent, les mêmes qualités et les mêmes défauts : chez ces populations laborieuses et patientes, tout sentiment généreux semble oblitéré. La race chinoise a l’instinct de l’ordre et de la discipline, comprend et sait pratiquer la plupart des vertus domestiques, la sainteté du mariage, le respect des vieillards, l’amour des enfans ; en revanche, une avidité extrême la rend peu scrupuleuse sur les moyens de s’enrichir. À l’énergie, au courage militaire qui leur faisait défaut, ces peuples ont substitué la souplesse et la ruse ; ils ne sont point à craindre sur le champ de bataille, mais nul ne sait mieux qu’un Chinois méditer une vengeance patiente et ourdir un guet-apens : ses principes de morale ne reposent que sur la recherche exclusive du bien-être matériel. Les tribus nomades qui vivent sous des tentes en dehors de la grande muraille sont essentiellement religieuses ; les populations de la Chine, du royaume annamite et de la Corée, se montrent complètement indifférentes aux mystères de la vie future : Un labeur excessif a courbé leurs esprits vers la terre. Ces hommes n’ont point de loisir pour les aspirations d’un ordre supérieur, et la lutte de chaque jour les défend des vagues inquiétudes de l’avenir. L’idée de la mort les occupe moins que la crainte de la famine ; ils élèvent des temples à leurs dieux, et n’ont en réalité ni religion ni culte extérieur ; ils ont des pratiques superstitieuses, à l’aide desquelles ils essaient de se rendre le sort propice. L’encens qu’ils brûlent devant l’autel leur tient lieu de prières. Au ciel, aux astres, aux génies, aux mânes des ancêtres, — qu’ils adoptent le vague déisme de Confucius, les rêveries de Lao-tseu ou les doctrines qu’il y a près de quinze siècles le bouddhisme