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s’ouvrir. M. de Rosamel suivit à Chou-san l’escadre anglaise, et ne voulut quitter les mers de Chine qu’en apprenant l’arrivée de la frégate l’Erigone à Manille.

Nul n’était mieux préparé que le commandant de l’Érigone, M. Le capitaine de vaisseau Cécille, pour le double rôle que les circonstances allaient imposer au représentant de la France dans ces parages. Il fallait se montrer à la fois marin entreprenant et négociateur habile. La guerre, un instant suspendue, allait recommencer avec plus d’activité que jamais. Arrivé à Macao, M. Cécille sut attirer vers lui les regards des autorités chinoises éperdues, et donner de sages conseils sans sortir de la plus stricte neutralité. En cachant la vérité à l’empereur, les mandarins s’exposaient à perdre l’empire. Le péril si pressant leur avait ouvert les yeux, il ne fut point difficile de les convaincre de l’impuissance de la Chine, de la nécessité de traiter avant que de nouveaux triomphes eussent rendu les Anglais plus exigeans ; mais ce qui n’était donné à aucune éloquence, c’était d’inspirer à ces fonctionnaires un courage inconnu dans ces cours serviles : braver le courroux du souverain pour l’éclairer sur les dangers que courait son trône était une perspective que nul d’entre eux n’osait envisager. Les destinées de la Chine purent donc s’accomplir. Les Anglais remontèrent le Yang-tse-kiang ; le point vulnérable de l’empire fut découvert, et l’on sut désormais où devaient porter les coups pour qu’on les sentît à Pe-king Accueilli avec une distinction toute particulière par l’amiral sir William Parker, qui aimait jusque dans l’officier d’une marine rivale l’homme le plus habile et résolu, le commandant Cécille put suivre, avec sa frégate, l’escadre anglaise à Wossung. Invité à assister à la conclusion du traité qui fut signé à bord du Cornwallis il remonta sur une jonque à Nan-king, et fut présenté par l’amiral anglais aux commissaires impériaux.

Peu de jours après la signature de ce traité, une corvette française venait jeter l’ancre au milieu de la flotte britannique. C’était la Favorite, commandée par M. Page. À l’honneur de notre marine, cet officier avait entrepris de réaliser seul, sans autre secours que quelques instructions vagues et un grossier croquis de la carte du capitaine Bethune, ce que l’escadre anglaise, avec toutes ses ressources, n’avait point exécuté sans péril. Le capitaine Page ne se laissa détourner de son dessein par les difficultés qu’il rencontra sur sa route, ni par les sérieux dangers auxquels fut exposée la Favorite. Il réussit, et les Anglais apprirent une fois de plus qu’ils n’avaient point seuls dans les entreprises maritimes le privilège de l’audace et de la constance.

Le traité de Nan-king ne stipulait que les principales conditions de la paix. Ce fût à Canton, par une convention débattue entre les commissaires de l’empereur et sir Henry Pottinger, que furent déterminés