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DU


MOUVEMENT INTELLECTUEL


PARMI LES POPULATIONS OUVRIERES.




II.[1] LES OUVRIERS DU NORD DE LA FRANCE.




À aucune époque de notre histoire, les classes ouvrières n’ont été complètement étrangères au mouvement général de la société. Durant les siècles mêmes où elles sont plongées dans les plus profondes ténèbres, si nous pouvons saisir, au milieu des récits des chroniqueurs, quelque peinture de leur état moral ; nous les voyons ressentir en une certaine mesure les grandes émotions qui agitent au-dessus d’elles les autres classes sociales. Aux temps des croisades, des guerres avec l’Angleterre ou des guerres de religion, par exemple, le mouvement n’avait-il pas pénétré jusqu’aux dernières couches populaires ? Cependant, sous l’ancienne monarchie, on chercherait en vain, parmi les masses, un courant d’idées, un travail intellectuel qui leur fût propre. Exclues de toute participation à la vie publique, elles n’ont pas, comme le clergé, la noblesse et la bourgeoisie, une histoire politique à elles. La condition des travailleurs éprouve, il est vrai, de successives transformations : grace à l’idée chrétienne elle se relève de l’avilissement antique ; mais en définitive les ouvriers restent renfermés dans la corporation,

  1. Voyez dans la livraison du 1er juin, l'Enseignement industriel en France.