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d’autant moins admissible, que la constitution hollandaise garantit dans les termes les plus formels les droits des créanciers de l’état.

Le ministère néerlandais se verra probablement bientôt dans la nécessité de se reconstituer plus complètement. Le portefeuille de la marine est toujours par intérim dans les mains du ministre de la guerre. On parle du capitaine lieutenant M. van Karnebeek, pour succéder au vice-amiral Lucas dans ce département. Le ministre de la justice, M. Nedermeyer van Rosenthal, atteint à la fois par des malheurs de famille et par des échecs parlementaires, a su pourtant se maintenir. En somme, la discussion du budget ne manquera pas de fournir plus d’une occasion où l’on pourra juger la force du ministère. D’ici-là, quoique l’on ne soit pas encore tout-à-fait en villégiatures le gouvernement court un peu le pays. Le roi a fait récemment quelques excursions dans les provinces, et il est assez intéressant de comparer les voyages de sa majesté néerlandaise avec ceux de sa majesté prussienne. Le roi Guillaume III, qui ne se pique point de donner des leçons, ne s’en trouve pas au demeurant plus mal. Sur les différens points où il s’est montré, ce prince s’est surtout attaché à étudier les progrès de : l’agriculture et l’état des relations commerciales. Dans la Zélande, il a voulu assister à l’ouverture d’un congrès agronomique et à l’essai d’instrumens aratoires dans un des polders ; à Rotterdam, il a reçu une véritable ovation. Cette seconde métropole du commerce hollandais avait préparé une réception magnifique au jeune souverain. Ce n’étaient cependant pas tant les illuminations grandioses de la ville et des navires, ce n’étaient pas tant les fêtes originales et somptueuses de ces jours de bruit et de plaisir qui donnaient à la solennité son plus remarquable caractère : c’était surtout l’échange cordial des bons sentimens qui animaient l’un pour l’antre la population et le roi. À Groningue, même expansion de la loyauté nationale, que la naissance d’un prince vient encore tout récemment de rendre plus vive. De son côté, M. Thorbecke a fait aussi une tournée dans les provinces du nord, où il a été très bien accueilli. Ces manifestations spontanées prouvent l’heureux accord qui existe dans les Pays-Bas entre la personne royale, les dépositaires du pouvoir et la masse du pays. On ne sépare point dans son attachement la dynastie des institutions, et le descendant de la vieille maison d’Orange sait porter au gré de tous le rôle toujours difficile de monarque constitutionnel.

Les négociations du gouvernement hollandais avec la Prusse au sujet de l’embranchement du chemin de fer rhénan sur l’Allemagne ont abouti à une solution favorable pour les deux pays : le prolongement du chemin de fer rhénan jusqu’aux frontières prussiennes a été décidé. Depuis quelque temps, on parle beaucoup d’annexer les voies ferrées de la Hollande à celles de la Belgique. On voit que la hollande aspire aussi à entrer de plus en plus dans le mouvement général du commerce et à multiplier ses points de contact avec les pays qui l’entourent.

Les nouvelles des colonies néerlandaises sont assez rassurantes. Les Chinois révoltés de Bornéo se sont définitivement soumis. Le choléra s’est, il est vrai, déclaré à Java et ailleurs dans l’archipel ; mais il n’a point, à beaucoup près, l’intensité qu’il avait en 1821, lorsqu’il régnait d’une manière si cruelle aux Indes.

ALEXANDRE THOMAS.