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Par un acte du 26 juin 1849, l’Angleterre a inauguré, dans cette branche si importante de sa législation économique, une politique nouvelle; elle a rompu définitivement avec le principe restrictif, et elle a introduit dans ses lois maritimes le système du libre échange que les réformes de sir Robert Peel, poursuivies et complétées sous le ministère de lord John Russell, avaient appliqué d’abord à ses lois commerciales. En 1850, la Hollande, suivant l’exemple de l’Angleterre, a proclamé les mêmes doctrines; elle est revenue au libéralisme qu’elle avait déjà pratiqué avec succès aux XVIe et XVIIe siècles, et qu’elle n’avait abandonné que lors de son union avec les provinces industrielles de la Belgique. D’autres peuples préparent en ce moment une révision plus ou moins complète de leur code maritime. La France elle-même, qui trop souvent a négligé ses intérêts économiques, se voit nécessairement amenée à examiner si les réformes qui se multiplient autour d’elle lui seront nuisibles ou profitables, si elle doit les imiter, et dans quelle mesure. La question est à l’étude, et il convient, pour la résoudre avec maturité, de recueillir tous les faits, tous les enseignemens qui s’offrent à nous.

L’Angleterre et la Hollande ont ouvert la voie des réformes. Il y aurait, par conséquent, profit à connaître exactement les motifs qui ont inspiré leur politique et à signaler les résultats de l’expérience déjà faite. C’est ce but que nous voudrions atteindre en retraçant l’historique de la législation maritime dans ces deux pays avant les dernières réformes, et en cherchant à apprécier la portée véritable des nouvelles lois de navigation en Angleterre comme en Hollande.


I.

Il faudrait remonter au XIVe siècle pour prendre à l’origine l’historique de la législation maritime de l’Angleterre. Dès cette époque, la marine nationale fut encouragée par des statuts qui lui assuraient le monopole presque exclusif des transports. Plusieurs souverains étrangers ayant menacé d’exercer des représailles contre le pavillon anglais et de lui fermer leurs ports, un acte de 1558, rendu sous le règne d’Elisabeth, apporta quelques tempéramens au régime prohibitif; mais en 1562 on revint à l’application de l’ancien système : on alla même jusqu’à augmenter le nombre des jours maigres dans le but de favoriser la pêche. Les infractions à cette loi étaient passibles des pénalités les plus rigoureuses. C’est ainsi que l’on protégeait la marine au temps de la reine Elisabeth, et l’Angleterre obéissait. Le peuple anglais faisait maigre pour consommer les morues et les harengs de la pêche nationale.

Toutefois ces encouragemens furent à peu près stériles. Le pavillon hollandais flottait alors, sans rival, dans les mers d’Europe, et les