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en guerre avec les Provinces-Unies, interdit au pavillon hollandais l’entrée des ports de la péninsule ibérique.

Les Hollandais se virent donc obligés de se frayer eux-mêmes une route directe vers les Indes. Ils tentèrent d’abord de pénétrer dans l’est par le pôle nord. En 1594, une expédition, composée de quatre navires, alla se briser contre les montagnes de glace de la Nouvelle-Zemble. Deux autres expéditions furent également infructueuses. Les Hollandais, repoussés du pôle nord, se décidèrent à prendre la route du cap de Bonne-Espérance. En 1595, Corneille Houtman conduisit dans les Indes la première escadre des Pays-Bas. Ainsi ce furent les prohibitions de Philippe Il qui contraignirent la Hollande à se lancer, elle aussi, dans cette course d’aventures, où elle devait rencontrer les pavillons de ses ennemis, les vaincre, créer un vaste empire colonial et poser les fondemens de sa prospérité actuelle. Il n’est point nécessaire d’indiquer ici comment les Hollandais s’établirent successivement à Java, dans les Moluques, à Ceylan, sur le continent de l’Inde, sur les côtes de Chine, au Japon : qu’il nous suffise de rappeler que, grâce au développement de leur marine marchande, ils se trouvèrent en mesure d’équiper de nombreuses flottes de guerre et de tenir tête, pendant le XVIIe siècle, à la Grande-Bretagne et à la France.

Cependant, dès cette époque, l’acte de navigation promulgué en Angleterre avait réduit dans une proportion notable les opérations du pavillon hollandais. Dirigé contre les tiers pavillons, il devait naturellement frapper la marine des Pays-Bas plus que toute autre. Les négocians d’Amsterdam et d’Anvers songèrent à l’emploi des représailles; mais leurs propositions n’eurent aucune suite; et si, dans certaines occasions, on appliqua aux marchandises étrangères un tarif plus ou moins élevé, la législation maritime demeura exempte de tout droit différentiel, de toute entrave, car la Hollande n’était et ne pouvait être qu’un pays d’entrepôt, et son intérêt bien entendu lui conseillait d’attirer dans ses ports tous les produits du monde, sans distinction de pavillon. Cette franchise de la législation fut donc maintenue, alors même que les Pays-Bas voyaient se dresser autour d’eux, dans la plupart des pays commerçans, en Angleterre, en France, etc., les barrières de la protection; mais, à mesure que chaque nation, imitant l’exemple de la Grande-Bretagne, excluait le pavillon tiers, la Hollande perdait une partie de ses transports, et à la longue elle se vit réduite à l’intercourse direct avec les pays d’Europe, aux pêcheries, au cabotage et à la navigation coloniale, dont l’accroissement ne pouvait encore compenser les sacrifices que lui imposait l’application presque générale du principe protecteur.

Lorsqu’à la suite des dernières guerres européennes les provinces belges furent de nouveau réunies à la Hollande, la législation