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La cité d’Indra, tel est le nom du palais où tous les dieux sont rangés, statues d’or ciselées finement et incrustées de pierres précieuses.

Il y en a bien trente mille, trente mille figures bizarrement effroyables, mélange de l’homme et de la brute, chacune avec plusieurs mains et plusieurs têtes.

Dans la salle de pourpre, on voit avec admiration treize cents arbres de corail, aussi grands que des palmiers, immense forêt rouge aux branches tortillées, aux entrelacemens étranges.

Le pavé, fait du cristal le plus pur, reflète tous ces arbres, et des faisans au plumage brillant et bariolé s’y prélassent majestueusement.

Le singe favori de Mahavasant porte au cou un ruban de soie; à ce ruban est attaché la clé qui ouvre les salles appelées salles du sommeil.

Là, les pierreries les plus précieuses sont amoncelées à terre comme des petits pois; on y trouve des diamans gros comme des œufs de poule.

C’est là, sur d’énormes sacs remplis de perles, que le roi aime à s’étendre. Le singe se couche sur le monarque, et tous deux s’endorment et ronflent de compagnie.

Mais le plus précieux de tous les trésors du roi, son bonheur, le ravissement de son ame, la joie et l’orgueil de Mahavasant, c’est son éléphant blanc.

Pour servir de demeure à cet hôte auguste, le roi a fait construire le plus beau des palais. Le toit, tout couvert de plaques d’or, est supporté par des colonnes à chapiteaux de lotus.

Trois cents trabans sont debout à la porte, garde d’honneur de l’éléphant; et, à genoux, le des courbé, cent eunuques le servent.

On place sur un plat d’or les plus friands morceaux pour sa trompe : il boit, dans des seaux d’argent, du vin assaisonné des plus douces épices.

On le frotte avec de l’ambre et de l’essence de rose, on orne sa tête de couronnes de fleurs, pour tapis de pied, il a les plus précieux châles de cachemire.

La vie la plus douce lui est faite; mais personne n’est content ici-bas. Le noble animal, on ne sait comment, est tombé dans une mélancolie profonde.

Il est là, triste, au milieu de l’abondance, le blanc mélancolique. On veut le consoler, on veut le distraire; les efforts les plus ingénieux sont impuissans.

En vain les bayadères viennent danser et chanter devant lui; en vain retentissent les cornes et les timbales des musiciens. Rien ne peut égayer l’éléphant.

Comme son état empire chaque jour, le cœur de Mahavasant devient