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tandis que la partie occidentale est montagneuse, arrosée et en conséquence peuplée. S’il est difficile d’apprécier le nombre des habitans d’une ville de Perse, il l’est bien davantage d’arriver à un chiffre exact pour la population du pays même. On l’a portée à moins de sept millions; nous croyons que ce chiffre est trop faible. D’autres voyageurs ont pensé qu’elle était de neuf millions ou même de treize millions d’ames; il nous semble que ce dernier chiffre est celui qui s’approche le plus de la vérité.

A côté d’une population sédentaire de citadins et de ratas ou paysans, la Perse compte une assez nombreuse population nomade, les iliâts. Ceux-ci vivent constamment sous des tentes, ce qui leur a fait donner le nom de kara-tchâder ou tentes-noires, à cause de leur couleur. Tous les nomades sont mahométans chiites ou sunnites; quant aux Persans sédentaires, ils sont musulmans chiites, chrétiens catholiques ou schismatiques, juifs et guèbres ou sectateurs du magisme; on distingue ces derniers par le nom de Parsis. La nation persane, telle qu’elle est constituée aujourd’hui, est, on le voit, un composé d’élémens singulièrement hétérogènes, et sans doute on est fondé à chercher dans cette diversité d’élémens les motifs des guerres civiles qui ont si souvent ensanglanté le sol sur lequel tant de peuples se trouvent agglomérés. Sur les branches-mères d’antique origine, Mède ou Parthe au nord, et Perse au sud, il est venu se greffer un nombre considérable de populations étrangères. Celles-ci se sont mêlées à la race aborigène; mais sur plusieurs points la fusion est incomplète, et chacune des fractions étrangères a conservé ses mœurs, son genre de vie, sa religion et jusqu’à sa langue. Dans la zone du nord, la population se compose en grande partie de Turcs venus à la suite des invasions tartares et restés dans le pays. Plusieurs tribus de race turque ont des résidences fixes, par exemple dans l’Azerbaïdjan ou dans le Mazenderan. La zone du centre voit se mêler iv. ses habitans de souche persane beaucoup de Kurdes, de Zends, ancienne race du sud, ou de Bactyaris, qui sont presque tous nomades. On ne sait au juste d’où viennent les derniers; ils passent pour être étrangers à la Perse et Turcs d’origine : eux-mêmes, ils se disent venus de l’est. S’il n’était pas hasardeux de chercher leur nationalité dans le nom qu’ils portent, on pourrait les croire venus en effet de la Turcomanie, qui est l’ancienne Bactriane, car le rapprochement est facile entre ce nom et celui qu’ils ont conservé. C’est dans le sud que la population persane est le plus bigarrée et en même temps le moins sédentaire; à côté des Zends, premiers possesseurs du sol. se trouvent, sous les noms de Lours. Faïlis, Mamacenis, Arabes et même Beloutchis, de nombreuses familles toutes distinctes les unes des autres, ayant des mœurs et une religion différentes. Le persan ou farsi est bien la langue commune à toutes ces populations,