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à le couvrir dans une seconde épreuve, et les whigs, en touchant ainsi au système électoral, n’iront-ils pas alors se fondre avec les radicaux, de même qu’ils avaient épousé une vraie querelle d’antiques tories, en se faisant les promoteurs du fanatisme anglican ? Nous regretterions sincèrement que les nobles traditions de cette illustre école politique fussent ainsi gaspillées sur des voies qui ne sont pas les siennes, pour le seul besoin des circonstances. D’un autre côté, le budget de sir Charles Wood a vraiment bien du malheur ; ce n’est pas un déficit à remplir qui embarrasse aujourd’hui l’Échiquier britannique, c’est un surplus de recettes à distribuer, et il se trouve que, chaque intérêt ou chaque parti voulant avoir le meilleur lot, il y a beaucoup, plus de mécontens à faire, grace à cette surabondance du revenu, qu’il n’y en aurait en face d’une situation moins prospère. Cette prospérité remonte, il est vrai, à l’initiative audacieuse et féconde de sir Robert Peel. Les whigs n’en sont que les héritiers, et l’on dirait que l’héritage les écrase ; leur chancelier du moins a tout l’air de succomber sous la tâche. Sir Charles Wood avait à sa disposition un excédant de près de 50 millions, 1,890,000 liv. sterl. il s’est efforcé d’en tirer le plus d’usage possible il s’offrait à lui deux procédés très simples pour en avoir tout de suite l’emploi deux impôts surtout en Angleterre ont maintenant le privilège d’exciter la clameur publique, l’ncome-tax et la taxe des fenêtres. Celle-ci rapporte tout juste les 50 millions de l’excédant ; on pouvait la biffer d’un trait de plume ; on pouvait également rabattre un tiers sur l’income-tax. Sir Charles Wood n’a point osé tailler en plein drap ; et, à tort ou à raison (le tortt en tout cas aurait été rudement aggravé par la mauvaise humeur des partis), il a préféré des combinaisons moins héroïques et moins populaires. Il a bravé l’impopularité de l’income-tax, dont il demande encore la prolongation pour trois ans ; il n’a guère diminué celle que la taxe des fenêtres valait au gouvernement en la remplaçant à peu près par une taxe sur les maisons. Bref, il a profité de ses ressources pour dégrever un peu par ci, un peu par là, pour réduire, il faut lui rendre cette justice, quelque chose du montant de la dette publique, augmentée, comme on sait, de 27 millions sterl. En plein temps de paix, mais, somme toute, le chancelier de l’Échiquier n’a point eu l’idée de quelque mesure à effet qui pût dominer par un grand éclat financier la fausse situation politique de ses collègues. L’idée va-t-elle maintenant se trouver ?

L’avenir incertain, l’attitude vacillante du gouvernement avaient naturellement suspendu le mouvement ordinaire des chambres. Les lords n’ont pas laissé cependant de se préoccuper beaucoup des questions coloniales, qui éveillent à tout instant la sollicitude publique, parce qu’elles se présentent sans cesse sur un point ou sur l’autre du vaste empire anglais. Aujourd’hui ce sont les colons de l’Australie qui menacent de s’opposer, comme ont fait ceux du cap de Bonne Espérance, à l’invasion croissante de la population criminelle, au débordement des convicts, jetés de tous temps sur leurs côtes par la transportation. La Nouvelle Galles du Sud, qui doit son origine aux convicts, devient un état de plus en plus florissant ; on fonde une grande université à Sydney ; la vie s’y fait chaque jour plus commode et plus policée ; les descendans des premiers transportés ne veulent pas se retrouver en présence d’hommes qui sont maintenant ce que furent leurs pères Toutes les colonies australiennes se sont unies pour former une anti-convict league, et c’est assurément là l’un des plus