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Page:Revue des Deux Mondes - 1851 - tome 9.djvu/653

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et persans qui se rendaient dans l’Inde, la Malaisie et la Chine. Les Arabes avaient fondé des comptoirs dans toutes les villes situées sur les côtes de la péninsule du Guzarate et tout le long de la côte orientale de la presqu’île du Dékan, et y vivaient mêlés en nombre considérable avec la population indigène. Ils fréquentaient la côte nord de Sumatra, et entretenaient avec les habitans des rapports tellement actifs et suivis, que ceux-ci, au dire des auteurs malays, avaient appris à parler l’arabe comme leur langue nationale. En Chine, ils étaient établis dans trois villes du littoral, à Canton, que les Chinois nommaient alors Thsing-Hai, à Kang-Fou, dans la province de Tché-Kiang, et à Zeytoun (Tseu-Thoung), dans le Fo-Kien, et ils y étaient si nombreux, qu’ils avaient un cadhi pour régler leurs affaires civiles et un imam pour présider aux cérémonies de leur culte, qu’ils pratiquaient en toute liberté.

Il nous reste un monument précieux de ces anciennes pérégrinations dans une relation rédigée en 851 de notre ère, d’après les récits d’un marchand Appelé Soleyman, qui s’était fixé sur les bords du golfe Persique ou dans les environs, probablement à Bassora, et qui avait fait plusieurs voyages dans l’Inde et à la Chine. C’était le temps où les communications entre la Chine et l’empire des Arabes étaient dans la plus grande activité. Cette relation fut complétée quelques années plus tard par un nommé Abou-Zeyd Hassan, qui était originaire de la ville de Syraf, port de mer alors très fréquenté dans le Farsistan, sur les bords du golfe Persique. Abou-Zeyd n’était jamais allé dans l’Inde ni à la Chine ; mais il avait recueilli une foule de particularités intéressantes sur ces deux pays, de la bouche des marchands qui les avaient visités, et entre autres d’un Arabe établi à Bassora et nommé Ibn-Vahab. Celui ci, non content d’aborder sur les côtes de la Chine, comme le faisaient ses compatriotes, avait eu le désir de voir la capitale du Céleste Empire située à deux mois de distance de la mer, et s’était fait présenter à l’empereur. Le récit de Soleyman et d’Abou-Zeyd est depuis long-temps connu du public européen par la traduction française de l’abbé Renaudot. Tout récemment. M. Reinaud en a donné une nouvelle version, que les progrès des études orientales lui ont permis de rendre beaucoup plus fidèle que celle de son devancier, et à laquelle il a joint un commentaire qui éclaircit une foule de questions géographiques, restées jusqu’à présent sans solution.

Une composition conçue dans le même esprit que la précédente, et qui, sous un cadre romanesque, contient des détails vrais au fond, est le récit des aventures d’un personnage appelé Sindebad, qui est supposé avoir vécu au temps du khalife Haroun-Alraschid. Poussé par une curiosité insatiable, Sindeba parcourut successivement les mers de Zanguebar, de l’Inde et de la Malaisie. Cette narration, que Galland a insérée dans sa belle traduction des Mille et Une Nuits, a été puisée, suivant l’opinion de M. Reinaud, aux sources arabes, et offre un reflet des traditions qui avaient cours chez les musulmans au moyen-âge sur les contrées que baignent les mers orientales.

Vers le milieu du IXe siècle un homme du nom de Sallam et que la diversité des langes qu’il parlait avait fait qualifier du titre de tardjeman ou interprète, fut chargé par le khalife Vathek Billah d’aller explorer les régions au nord du Volga, de la mer Caspienne et du Yaxartes, limites qui n’avaient pas encore été dépassées par les armées musulmanes. Sa mission avait surtout