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dans l’ame de ce peuple qui, depuis tant d’années, n’a plus de respect, que pour l’aveugle loi du salus populi. Ce n’est pas aujourd’hui qu’il faut se mêler de prédire la fin des choses ; tout est obscur devant nous, et l’on voit à peine à ses pieds. Est-il néanmoins impossible de se figurer en 1852 un scrutin populaire où il n’y ait que des noms inconstitutionnels pour se disputer les suffrages, le nom du président actuel, celui de quelque furieux de Londres, et, qui sait ? peut-être encore celui d’un exilé de Claremont. Il ne vaudra plus la peine alors de songer à la révision, la besogne sera faite, mais comment ?

Nous voudrions que l’assemblée n’écartât pas trop loin d’elle ces anxiétés de plus en plus vives dans le public, il ne serait pas mauvais qu’elle en ressentît di quelque chose, et les et assez à cœur pour y vouloir à toute force apporter un remède. Nous n’en sommes pourtant pas à nous figurer que nos épreuves soient si près de finir. Comme nous l’avons dit, les deux derniers épisodes de notre histoire parlementaire sont des scènes de division et de coalition. Du schisme de la place des Pyramides, nous confessons franchement que nous sommes assez embarrasses d’en parler. Nous avons pour la plupart des séparatistes un respect infini mais nous n’en comprenons pas davantage que des hommes comme M. Baroche et M. Faucher leur paraissent désormais des suspects, et il nous est devenu maintenant très difficile de tenir par exemple pour un brouillon et pour un boute-feu M. Beugnot, qui s’est associé si entièrement à la campagne dirigée par M. Thiers sur l’instruction publique. À vrai dire, on n’est pas toujours certain de garder ses alliés dans cette excessive mobilité des circonstances et des humeurs contemporaines. Ne voilà-t-il pas aussi que M. de Montalembert perdu pour M. Thiers ? Nous n’insisterons pas davantage sur cet incident regrettable ; nous en déduirons seulement une observation que nous avons eu déjà plus d’une fois sujet de faire : c’est que les réunions parlementaires qui se tiennent en dehors de l’assemblée nationale ont peut-être en somme plus d’inconvéniens que d’avantages politiques. Elles redoublent les occasions de froissemens et de susceptibilités au moins autant qu’elles servent les combinaisons stratégiques des partis ; elles élèvent de petites tribunes pour de petits orateurs qui s’y dédommagent de ne point assez paraître à la grande ; elles ont leurs honneurs, leurs brigues ; elles alimentent l’une des maladies les plus communes de l’époque, et dont on n’est point exempt pour être législateur, le mal des importances rentrées.

Quant à la discussion préparatoire qui a duré trois jours dans les bureaux de l’assemblée, elle a mis en pleine lumière un fait sur lequel on n’avait pas encore eu l’occasion de s’édifier aussi complètement. Nous voulons parler de cette singulière coïncidence qui s’est produite entre les opinions de l’extrême gauche et celles d’une notable fraction du parti légitimiste, relativement aux matières d’organisation administrative. Deux points surtout dans ce projet de loi ont appelé, l’attention des bureaux : la question de savoir si la loi du 31 mai prévaudrait pour les élections communales aussi bien que pour les élections politiques ; la question de savoir si les maires seraient ou non nommés par le pouvoir exécutif. Ces deux questions n’étaient pas précisément nouvelles au sein de l’assemblée, elles y reparaissent avec la loi organique qui ne pouvait manquer de les comprendre ; elles y avaient déjà été introduites ou à peu près dans des rencontres plus particulières. On se rappelle que le gouvernement