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Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 14.djvu/1053

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en servant sous lui au siège de Mardyk. On était en automne. Le jour de la Toussaint, ces demoiselles firent leurs dévotions avec l’exactitude accoutumée. Ensuite on se livra à d’honnêtes divertissemens, et, faute de mieux, dans ces longs loisirs de. la campagne, avec le goût dominant du bel esprit, dans la compagnie et peut-être avec l’aide de quelque secrétaire, Montreuil ou Sarrazin, on se mit à rimer tant bien que mal, en sorte que le jour de la Toussaint même on adressa à Marlou, où était Mme la Princesse, la Vie et les Miracles de sainte Marguerite-Charlotte de Montmorency, princesse de Condé, mis en vers à Liancourt. Ces vers, dit le manuscrit auquel nous empruntons ces détails[1], furent faits sur-le-champ, et les auteurs paraissent avoir été Mlle de Bourbon et Mlles de Rambouillet, de Boutteville et de Brienne. Nous en donnons quelques-uns :

Il nous reste à prier une sainte vivante,
Une sainte charmante, etc.

Sitôt qu’elle nacquit, ses beaux yeux sans pareils
Parurent deux soleils ;
Son teint fut fait de lys, et sur ses lèvres closes
On vit naître des roses.
Puis elle les ouvrit et fit voir en riant
Des perles d’Orient.

Elle faisait mourir par un regard aimable,
Autant que redoutable ;
Puis d’un autre soudain que la sainte jetait,
Elle ressuscitait.

On ne pouvait oublier les deux aimables absentes, Mlles du Vigean, qui s’ennuyaient à Paris pendant qu’on s’amusait sans elles à Liancourt. On leur écrivit donc une assez longue lettre en vers, où on leur dépeignait et le regret de ne pas les voir et les consolations qu’on se donnait. Ces vers inédits, comme les précédens, sont tout aussi médiocres ; mais il ne faut pas oublier que ce sont des impromptus de jeunes filles et de grandes dames.

Lettre[2] de Mlle de Bourbon et de Mlles de Rambouillet, de Boutteville et de Brienne, envoyée de Liancourt à Mlles du Vigean, à Paris.

Quatre nymphes, plus vagabondes
Que celles des bois et des ondes,
A deux qui d’un cœur attristé
Maudissent leur captivité.

  1. Manuscrits de Conrart, n-4°, t. XI, p. 443.
  2. Ibid., p. 851.