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baigné par la mer, à la marée haute, de trois côtés, au nord, au sud et à l’est. Du côté de l’ouest, par lequel la ville tient à la terre ferme, il y a un fossé de 15 mètres de large ; le mur d’escarpe donnant sur ce fossé n’a que 6 à 7 mètres de haut ; la contrescarpe qui limite le fossé du côté extérieur est aussi revêtue en maçonnerie. Cette enceinte a cessé d’être entretenue depuis long-temps et a subi de nombreuses dégradations ; le fossé du côté de l’ouest est en partie comblé. La bande de terrain située au sud-est de la ville est occupée par des bâtimens militaires et par une terrasse faisant face à la mer, sur laquelle sont placées en batterie quelques pièces de bronze d’un fort calibre, mais la plupart sans affût. Cette terrasse sert de promenade aux habitans.

On ne peut s’empêcher d’être frappé du grand nombre de maisons et d’édifices en ruine que l’on voit à Panama. L’aspect de ces ruines, dans une ville de date si récente, a quelque chose qui attriste le cœur d’un étranger. On commence maintenant à y élever quelques constructions neuves. Les Américains, qui ont un goût très prononcé pour les maisons de bois, voulaient en bâtir à Panama ; mais les autorités locales s’y sont opposées, dans la crainte des incendies. L’exemple de la ville de San-Francisco, qui brûle tous les six mois à peu près, est là pour prouver que les autorités de Panama n’ont pas tout-à-fait tort. Presque toutes les maisons se composent d’un rez-de-chaussée et d’un premier étage entouré d’un balcon couvert, ce qui donne un peu de fraîcheur aux habitations en les garantissant de l’action directe des rayons solaires. Le seul édifice un peu remarquable de Panama est la cathédrale, dont la façade est construite dans le style de la renaissance, un peu altéré par des ornemens d’assez mauvais goût. Les rues de Panama sont étroites, comme il convient d’ailleurs sous une latitude semblable ; mais elles laissent beaucoup à désirer sous le rapport de la propreté. Le balayage public se fait, à de très rares intervalles, par des forçats : il est vrai que les chiens et les vautours leur viennent en aide et rivalisent de zèle pour faire disparaître, en partie du moins, les débris jetés sur la voie publique. En dehors de la ville, à l’ouest, est le faubourg de l’Arrabal, que l’on traverse en venant de Chagres ; entre la ville et le faubourg, on trouve une place assez vaste qui sert aux réjouissances publiques, et notamment à des simulacres de combats de taureaux, où les adversaires font preuve, des deux côtés, d’une prudence qu’on ne saurait trop louer.

Panama est la résidence du gouverneur de la province de ce nom et d’un certain nombre d’autres fonctionnaires, notamment d’un commandant militaire, qui a sous ses ordres une garnison d’environ cent cinquante hommes : ce sont presque tous des nègres ou des hommes de sang-mêlé, qui portent un uniforme assez semblable à celui de nos troupes d’infanterie. La tenue de ces soldats laisse beaucoup à désirer,