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de l’équateur; cependant il n’a rien d’excessif, et le thermomètre de Farenheit se maintient toujours entre 65 et 87 degrés (20 et 30 degrés centigrades environ). Le pays est salubre, et jamais, disent les documens authentiques, on n’y voit de maladies épidémiques. Les indigènes et les personnes bien acclimatées jouissent d’une santé parfaite; les arrivans sont sujets à une fièvre d’acclimatement assez dangereuse, et due, à ce qu’il paraît, à des marécages alimentés par la saison des pluies. On a commencé quelques travaux de dessèchement; mais, en attendant qu’ils aient pu donner des résultats appréciables, il y a une précaution bien simple à prendre, précaution infaillible au dire d’un missionnaire qui a fait de nombreuses observations à ce sujet : elle consiste simplement à ne pas séjourner au bord de la mer en arrivant dans la Libéria, à aller se fixer dans l’intérieur, et à ne se rapprocher du littoral qu’au bout d’un certain temps.

Les revenus de l’état consistent dans un simple droit ad valorem perçu sur les marchandises importées; ce droit est de 6 pour 100; il faut y ajouter une surtaxe sur quelques articles, tels que les armes à feu, le tabac, le sel et les liqueurs spiritueuses. Il est perçu aussi un droit de patente sur les négocians et détaillans. Le tout peut monter à 20 ou 25,000 dollars par an.

La force armée du pays se compose de mille à quinze cents hommes de milice. Le territoire est ainsi délimité quant à présent : il a pour frontière nord la rivière de la Manna, par 6 degrés 62 minutes de latitude nord, et n’est plus séparé de la colonie anglaise de Sierra-Leone que par le district des Gallinas, le marché principal du commerce des esclaves. Au sud, il a pour limite la rivière de Grand-Sesters, par 4 degrés 35 minutes nord, et il confine avec la colonie de Maryland-in-Libéria. On fait depuis long-temps des tentatives pour acheter le territoire des Gallinas, ce qui expulserait définitivement la traite de la côte des Grains. Le développement de la frontière maritime est de 350 milles anglais (563 kilomètres), la profondeur moyenne est de 40 milles anglais (64 kilomètres).

Dans ses conditions actuelles, la république de Libéria se suffit à elle-même, et peut résister aux attaques des rois indigènes et des négriers. Elle trouverait d’ailleurs un secours efficace dans les tribus alliées et dans les croiseurs des grandes puissances en cas de péril extrême; mais elle a prouvé jusqu’ici qu’elle avait assez d’énergie pour se tirer d’embarras dans la guerre, et assez de bon sens et de véritable esprit public pour prospérer dans la paix avec les institutions les plus libérales.

Appuyée sur un sol d’une rare fécondité, trouvant la main-d’œuvre à bon marché[1], animée de l’esprit de la religion, de la liberté et du travail, se recrutant parmi des populations primitives, dont elle adoucit les mœurs sans détruire la puissance productrice, dont elle éclaire l’esprit sans obscurcir l’intelligence, la république de Libéria peut raisonnablement compter sur un avenir calme et prospère. C’est peut-être un grand bonheur pour elle que les louables excitations des sociétés de colonisation américaines n’aient agi que sur la partie saine de la population de couleur des États-Unis, et soient restées sans effet sur les masses abâtardies. Celles-ci n’auraient apporté dans la

  1. Le travail agricole est évalué à 1 fr. 25 cent, par jour.