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main-d’œuvre, c’est-à-dire l’alimentation et l’entretien de sa personne ? Aujourd’hui le chercheur d’or ne trouve plus que la valeur de 20 à 25 francs, il est vrai, mais il n’est plus astreint qu’à une dépense qui peut ne pas excéder 1 piastre ou 5 francs, en satisfaisant complètement aux premières nécessités de la vie[1]

Les intérêts français en Californie acquièrent de jour en jour une importance plus considérable, autant par le nombre de nos émigrans que par le chiffre élevé des capitaux qui s’y trouvent engagés. Le goût de nos produits, nos usages et nos habitudes tendent à se propager dans un pays qui est appelé à devenir un des plus vastes entrepôts du monde. Les améliorations qui ont été obtenues dans les dernières années et celles qu’on est sur le point de réaliser dans les moyens de transport[2] vont placer prochainement le port de San-Francisco au même rang que celui de New-York, sur les rives de l’Atlantique. L’opinion publique s’est déjà prononcée si énergiquement aux États-Unis pour l’exécution du chemin qui doit traverser le continent américain dans sa plus grande largeur, qu’il est permis d’espérer de voir, dans un temps peu éloigné, s’opérer la jonction des deux rives orientale et occidentale de l’Amérique, entre New-York et San-Francisco. Ici les difficultés sont immenses, le travail est gigantesque ; mais les obstacles de la nature sont autant d’attraits pour l’énergique persévérance du peuple américain. Les mines de la Californie, en attirant sur les fertiles rivages de l’Océan Pacifique une population jeune, active et entreprenante, doivent exercer sur la civilisation et le développement du génie humain une incalculable influence. La France a compris le rôle que lui imposent ces grandes éventualités, et aujourd’hui vingt mille de ses enfans la représentent noblement sur ces plages lointaines.


MARTIAL CHEVALIER.

  1. Grâce à la facilité des voies de communication, des dépôts et marchés considérables pour l’approvisionnement du mineur sont placés à proximité des terrains exploités de manière à lui permettre d’acheter lui-même, sans intermédiaire, les objets nécessaires à sa consommation. Ce que l’émigrant payait, il y a moins de trois ans, des prix excessifs et fabuleux auxquels refusaient de croire nos ménagères d’Europe, est généralement obtenu aujourd’hui à des prix presque ordinaires, au moins pour les Américains. À l’origine, la farine coûtait, près des lieux où l’or est extrait, 10 fr. la livre, le sucre et le café 20 fr. ; un œuf frais y a été payé jusqu’à quarante francs ! Les autres denrées étaient vendues en proportion. Actuellement le pain frais ne revient qu’à 50 centimes la livre, et les principales substances alimentaires peuvent souvent être acquises aux mêmes conditions qu’en Europe.
  2. D’une part entre les métropoles orientales des États-Unis et la partie occidentale du nouveau continent, d’autre part entre San-Francisco et la Chine, par de nouvelles lignes de steamers qui verseront en Californie tous les produits de l’Asie et de l’Océanie.