Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 15.djvu/1187

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

si long-temps inconnues. Nos expéditions militaires ont fourni le sujet de récits pleins d’émotion, d’intérêt et d’instruction tout à la fois ; nous citerons, entre autres, l’Expédition du général Cavaignac dans le Sahara algérien de M. le docteur Félix Jacquot, et l’histoire de la conquête de l’Algérie de M. le capitaine de Mont-Rond, livre excellent par la mise en œuvre, l’exactitude et la netteté du jugement, les lettres du maréchal Clausel sur les expéditions de Tlemcen et de Constantine, et la Bataille d’Isly du maréchal Bugeaud[1].

Outre les livres d’histoire que nous venons d’indiquer, le gouvernement publie, comme on l’a fait pour l’expédition de Morée, un grand recueil, l’Exploration scientifique de l’Algérie, à la rédaction duquel ont concouru des hommes spéciaux et pratiques initiés par l’étude et un long séjour à la connaissance de l’Afrique. En payant à la science cette dette de la conquête, on a voulu en même temps faire connaître au pays ce qu’avaient produit les sacrifices qu’il s’était imposés, et l’éclairer sur sa colonie par des faits précis et positifs. Dans cette vue, le ministre de la guerre a publié d’année en année des tableaux de situation des établissemens français en Algérie. Le dernier de ces tableaux a paru récemment, et, sans aucun doute, c’est là un des plus curieux documens ou plutôt une des plus belles pages de l’histoire contemporaine. La France, qui s’ignore souvent elle-même dans les limites de ses frontières continentales, peut apprendre là, et jusque dans ses moindres détails, ce qu’elle est dans sa colonie[2].

En comparant la publication qui nous occupe à celles qui l’ont précédée, nous avons constaté, sous le rapport des soins et de la mise en œuvre, un progrès considérable. Ce volume, malgré ses dimensions, est facile à consulter à cause de l’excellente méthode qui a présidé à l’exécution ; chaque chose est strictement à sa place. Après avoir présenté, dans sa première partie, le tableau des opérations militaires et des services dépendant de l’armée, on a, dans la seconde, fait l’exposé méthodique de l’organisation et des travaux des services publics. Le livre fait connaître l’Algérie sous le double aspect de la conquête et de la civilisation, et, comme le but n’est pas moins glorieux que les moyens, on ne peut en parcourir les pages sans éprouver, comme nous l’avons éprouvé nous-même, ce que nous appellerons la satisfaction du sentiment national.

L’historique des opérations militaires est rapidement et simplement exposé, et pour ceux qui aiment à se souvenir et à chercher, à la distance des siècles, des rapprochemens

  1. Le récit du maréchal a paru dans la Revue du 1er mars 1845.
  2. Cet excellent travail a été exécuté sous la direction de M. le général Daumas, qui, après avoir long-temps pratiqué l’Afrique en militaire et en administrateur, a été appelé à utiliser heureusement au ministère de la guerre, comme directeur des affaires de l’Algérie, les lumières acquises par une constante étude et une longue expérience. Les matériaux qui ont servi à la préparation ont été centralisés par une commission instituée auprès du ministère de la guerre. Cette commission, placée dans les attributions du chef du bureau de l’administration générale et des affaires arabes, M. de Lavergne, était présidée par l’ancien secrétaire-général de la préfecture de Constantine, M. Deloche, et se composait de MM. Faure, Roux et Tourneux, anciens auditeurs au conseil d’état, chargés de missions en Algérie, et Beaulieu, précédemment attaché à L’administration centrale.