Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 15.djvu/486

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

encore. Les questions de matériel ont assurément leur importance, et ce n’est pas chose indifférente pour la France que le nombre plus ou moins grand de navires qu’elle aura à flot ou en chantier, la transformation plus ou moins rapide qu’elle fera de ses vaisseaux à voiles en vaisseaux à vapeur. À bien prendre cependant, tout cela n’a qu’une importance secondaire. Lorsqu’il ne s’agit que de façonner du fer et du bois, les questions de temps peuvent se traduire en questions d’argent, et l’activité répare les torts de la négligence. Ce qui ne s’improvise pas, ce que l’argent ne peut procurer, ce sont les hommes, c’est le caractère que l’éducation a développé chez eux, c’est l’esprit qui les anime. Ici il faut l’œuvre du temps, il faut le travail d’une volonté ferme et suivie. Que cette œuvre soit interrompue, que cette volonté et cette suite viennent à défaillir, tous les trésors du monde ne répareront pas ce qu’on aura laissé perdre, ne renoueront pas le fil brisé des bonnes et salutaires traditions. Conservons donc précieusement cette escadre, arche sainte de notre marine, où se garde le dépôt sacré des traditions du devoir et de l’honneur ; conservons cette école permanente où officiers et matelots viennent à tour de rôle apprendre tous leur métier et recevoir l’inspiration de nos chefs les plus éminens ; conservons ce cadre riche et fécond d’où sortiraient, la guerre venant, autant d’escadres que le réclameraient les besoins et la volonté du pays.


Dans les pages qui précèdent, on s’est borné à retracer l’histoire de notre escadre de la Méditerranée. Un jour, peut-être, de nouveaux documens nous permettront de donner à nos lecteurs quelques épisodes de la vie de mer et d’autres souvenirs sur nos marins.


V. DE MARS.