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Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 15.djvu/715

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D’une part en effet, le prix de l’or, reprenant à peu de chose près son ancien niveau, a dépassé encore une fois la valeur légale ; de l’autre, la découverte que l’on a faite, vers le milieu de 1851, de riches gisemens aurifères dans les régions méridionales de l’Australie, semble venir à propos pour renouveler une controverse suspendue, mais non pus épuisée. Les élémens du problème changent et se compliquent d’heure en heure.

À défaut de documens officiels, nous avons les récits des pionniers et les renseignemens du commerce. Il nous est venu assez de lumières du nord, de l’ouest et du sud, pour que l’on puisse désormais établir tout au moins des conjectures sur la portée du mouvement qui s’opère dans la production des métaux précieux. J’ajoute que l’on abordera cette étude aujourd’hui avec un esprit dégagé des appréhensions qui tendaient à l’obscurcir. Le commerce des métaux qui servent de monnaie paraît être rentré dans des voies régulières. Le fantôme de la baisse ne semble, pas plus que celui de la hausse, suspendu en ce moment sur le marché. Tout récemment, pour empêcher la sortie de l’or, la Banque de France en a élevé la prime. À Londres comme à Paris, les réservoirs métalliques sont remplis. La banque d’Angleterre compte plus de 500 millions, et la Banque de France environ 600 millions dans ses caves. L’importation des métaux précieux en Europe s’opère lentement. Rien ne s’oppose donc désormais à cette observation patiente et sûre des faits qui seule peut légitimer les inductions de la science.


I

La valeur qui est attachée aux métaux précieux dans leur fonction de monnaie n’a rien d’arbitraire : il ne dépend ni des gouvernemens ni des assemblées de la fixer au gré de leurs convenances ou de leurs besoins. Les pouvoirs publics ne sont en cela que les organes des faits, dont ils subissent et proclament la loi. L’empreinte du souverain gravée sur les monnaies les érige en signes représentatifs de toutes les valeurs, en déclarant et en garantissant leur valeur intrinsèque ; mais le prix légal de l’or et de l’argent doit être l’expression exacte de leur prix commercial. En cela consistent la solidité et la régularité de la circulation monétaire.

Les causes qui déterminent la valeur des métaux précieux sont les mêmes qui concourent à fixer le prix des autres marchandises : c’est avant tout le rapport de l’offre à la demande, l’abondance relative ou la rareté de l’or sur le marché. Plus la richesse métallique d’un peuple vient à augmenter, et moins l’or et l’argent ont de prix aux yeux de tout le monde. Leur puissance commerciale diminue dans la