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Une autre raison fort grave contre le projet de l’Autriche, c’est la baisse de la valeur du papier-monnaie autrichien, qui perd 23 pour 100. Dans les pays étrangers à l’Autriche, on demande que les paiemens se fassent en argent, et on y augmenterait infailliblement le prix des marchandises en raison de la perte subie par le papier-monnaie. Le Zollverein surveille ses frontières avec la plus louable activité ; les fonctionnaires sont d’une probité généralement reconnue, et il y a eu très peu d’exemples de fraude. En Autriche, il n’en est pas de même ; la rétribution insuffisante des douaniers a beaucoup favorisé la contrebande. « La position précaire et le traitement insuffisant des douaniers, disaient avec raison les fabricans de la Bohême dans leur mémoire du 10 février 1850, les mettent en quelque sorte dans la nécessité de pactiser avec la contrebande, et de gagner par des abus ce qu’ils ne peuvent obtenir par les fatigues de leur service. C’est ainsi qu’ils accordent à la fraude une protection dont on ne trouve pas d’exemple dans d’autres pays, même dans ceux qui sont soumis au système de prohibition. »

On voit combien d’objections soulevaient les projets de l’Autriche. Aussi le congrès de Vienne n’a-t-il pas tenu moins de cinquante-sept séances, sans compter les réunions partielles des différentes commissions. La diplomatie autrichienne fit des merveilles d’habileté, et les plénipotentiaires ne tardèrent pas à s’écarter de la réserve qu’ils avaient d’abord scrupuleusement observée. Un grave événement, la mort du prince Schwarzenberg, fit peser une pénible impression sur les dernières séances du congrès, sans cependant que le programme de l’Autriche en subît aucune modification. Le 21 avril 1851, le nouveau ministre des affaires étrangères, M. le comte de Buol-Schauenstein, ferma le congrès, et fit adopter un protocole par lequel les plénipotentiaires engagèrent moralement leurs gouvernemens respectifs. Vu l’absence de la Prusse et des autres états du nord de l’Allemagne, les plénipotentiaires ne purent prendre une résolution définitive ; néanmoins on apprit plus tard qu’il avait été stipulé un article secret dont le texte est encore inconnu. Avant de quitter Vienne, les plénipotentiaires reçurent de l’empereur des distinctions et des décorations.

La veille de la fermeture du congrès de Vienne, le gouvernement prussien ouvrit un nouveau congrès à Berlin ; il confia la défense de ses intérêts à trois hommes éclairés, MM. de Pommer-Esche, directeur général des contributions, Delbrück, conseiller intime de régence, et Philippsborn, conseiller de légation. Ce dernier, quoique jeune encore, s’était déjà distingué connue consul-général à Anvers et comme négociateur du traité de commerce de la Prusse avec la Hollande. M. de Manteuffel ouvrit en personne les conférences et déclara formellement qu’il n’était jamais entré dans la pensée du gouvernement prussien de dissoudre le Zollverein. C’est le plénipotentiaire de Bavière qui vint