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la confédération. C’est le désir de ménager cette opinion qui aura sans doute inspiré à M. le comte de Buol le discours si modéré par lequel il a inauguré le nouveau congrès de Vienne. L’Autriche a d’ailleurs à tenir compte de l’attitude des gouvernemens voisins de l’Allemagne, qui n’envisagent point d’un œil pleinement satisfait l’essai d’un Zollverein austro-germanique. L’association prussienne avait déjà, dès ses origines, suscité bien des défiances en Europe. L’Angleterre du point de vue commercial, et la France du point de vue politique, y trouvaient plus d’un inconvénient. Les inconvéniens de l’union austro-allemande seraient plus nombreux et plus sensibles encore pour chacune des deux puissances. En effet, la Prusse, en s’unissant au Hanovre, faisait un pas dans la voie de la liberté commerciale, tandis qu’en acceptant l’alliance de l’Autriche, elle resterait pour le moins stationnaire dans le système protecteur. Quant à la France, elle peut toujours craindre de voir revenir sur le tapis, à la faveur d’un Zollverein autrichien, une idée beaucoup plus fâcheuse que l’unité allemande essayée naguère par la Prusse : ce serait l’incorporation de l’Autriche à l’Allemagne, sérieusement tentée en 1851. La Russie, on le sait, ne s’est pas montrée plus favorable que la France à cette conception hardie du cabinet de Vienne, et elle ne paraît pas approuver davantage la combinaison d’un Zollverein austro-germanique. Le cabinet de Saint-Pétersbourg a du moins refusé jusqu’à présent avec une persistance marquée le concours que lui demandait l’Autriche pour avoir plus facilement raison de la fermeté inattendue de la Prusse. Les gouvernemens étrangers, sans être en hostilité avec le cabinet de Vienne dans la question du Zollverein, n’encouragent donc point ses efforts autant qu’il le désirerait.

La résolution que l’empereur François-Joseph vient de prendre de son propre mouvement de ne point envoyer de représentans de l’armée autrichienne aux funérailles du duc de Wellington a vivement intéressé l’opinion en Autriche. Toutes les armées coalisées de 1815 auront des délégués à cette solennité, qui réveille les souvenirs d’une époque fatale à la France au moment même où, par un contraste qui n’est pas rare dans le jeu des choses humaines, la France relève les institutions et la dynastie que cette coalition avait renversées. L’Autriche s’abstient. L’armée autrichienne a été insultée à Londres dans la personne du général Haynau, et le gouvernement anglais a refusé toute réparation. L’empereur, ne veut pas que l’uniforme autrichien soit exposé à quelque nouvelle avanie de la populace. Cette circonstance est venue à propos fournir à l’Autriche l’occasion de prendre sa revanche d’un échec auquel on ne songeait plus, mais qu’elle n’avait point oublié. L’expédient, il faut l’avouer, est de bonne guerre, et ce n’est point à nous de gémir de la division qui éclate ainsi entre les alliés de 1815 sur le cercueil du duc de Wellington.

La Russie vient d’être frappée dans la personne de l’un des jeunes princes les plus distingués de la famille impériale, le duc de Leuchtenberg. Gendre de l’empereur, ce prince s’était fixé en Russie et identifié à tous les intérêts de l’empire. Les vues de bonheur domestique qui ont guidé le tsar plus que les considérations politiques dans le choix de ses gendres avaient été pleinement remplies par le duc de Leuchtenberg. Investi du grade de lieutenant-général, des fonctions de chef du corps des cadets des ingénieurs-mineurs et