Il se traîna encore quelques mois au milieu du mépris public ; la fin du règne de Louis XV hâta sa chute, et un des premiers actes de Louis XVI fut de rétablir l’ancien parlement ; mais en attendant cet événement, qui pouvait être encore éloigné, la terrible sentence rendue contre Beaumarchais subsistait avec toutes ses conséquences. Il voyait sa carrière brisée : deux procès perdus à la fois, dont l’un l’avait ruiné dans sa fortune et son honneur, et dont l’autre, en le relevant dans l’estime publique, l’avait tué légalement, pesaient sur lui de tout leur poids. Il avait à poursuivre la révision de ces deux procès ; il fallait d’abord faire casser le dernier jugement. Demander sans bruit cette cassation au conseil d’état, c’était s’exposer à un échec presque certain ; publier de nouveaux écrits était impossible. Louis XV, bien qu’il se fût amusé parfois des mémoires contre Goëzman, était cependant irrité de tout le bruit qui s’était fait autour de Beaumarchais ; il lui avait ordonné par M. de Sartines de garder un silence absolu ; mais les délais prescrits pour le recours en cassation s’écoulaient, et le jugement allait devenir irrévocable. Heureusement pour Beaumarchais que sa destinée, toujours un peu singulière, voulut que Louis XV, le jugeant sur l’habileté même qu’il venait de déployer dans l’affaire Goëzman, crut avoir besoin de lui. Comme les rois pouvaient alors, au moyen de lettres de relief, relever du laps de temps écoulé pour la révision d’un procès, il promit à Beaumarchais de le mettre à même de reconquérir son état civil, s’il remplissait avec zèle et avec succès une mission difficile à laquelle il attachait une grande importance, — et le triomphateur du parlement Maupeou partit pour Londres en qualité d’agent secret !
Pour tes concitoyens sois aussi débonnaire,
Aussi doux sur les fleurs de lys
Qu’on te vit pour les ennemis
Quand tu fus militaire.
Joseph, avec colère,
Dit à tous de sortir,
Et qu’après cette affaire
L’enfant voulait dormir.
Ah ! c’est donc sur ce ton qu’on nous met à la porte ?
Quoi ! Beaumarchais seul restera ;
Mais son mémoire on brûlera. —
L’auteur dit : Peu m’importe.
Ô troupe incorruptible,
Retournez à Paris :
Ce coup sera sensible
À tous les bons esprits.
La bêtise chez vous a passé la mesure,
Peut-être que cet accident
Nous rendra l’ancien parlement ;
On dit la chose sûre.
(*) Le président de Nicolaï.