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est adonnée au commerce, à l’industrie, aux professions libérales ; les champs proprement dits ne sont pas plus peuplés que dans le centre et le midi, mais il s’y trouve en sus des villes nombreuses, riches, manufacturières, et parmi elles, la plus grande et la plus opulente de toutes, Paris. Il s’y fait un grand commerce de denrées agricoles ; de toutes parts, les blés, les vins, les bestiaux, les laines, les volailles, les œufs, le lait, se diligent des campagnes vers les villes, qui les paient avec le produit de leur industrie. Dès lors, le bail à ferme y est possible, et en effet il s’y produit. Voilà la vraie cause du bail à ferme, son existence est l’indice infaillible d’une situation économique où la vente des denrées est la règle, et où conséquemment la culture peut devenir l’objet d’une industrie.

Cette industrie commence dès que s’ouvre le débouché régulier, c’est-à-dire dès que la population industrielle et commerciale excède une certaine proportion, soit qu’elle se trouve immédiatement sur les lieux, soit que la distance soit assez faible et le moyen de communication assez perfectionné pour que les frais de transport n’absorbent pas les bénéfices ; elle devient de plus en plus florissante à mesure que le débouché devient plus large et plus rapproché, c’est-à-dire dans les environs immédiats des grandes villes ou des grands centres de fabrication. Là le débouché est suffisant pour donner naissance à des bénéfices qui accroissent rapidement les capitaux, la culture devient de plus en plus riche, et tend vers son maximum. Tels sont les départemens les plus voisins de Paris. La moitié de la France à peu près est plus ou moins dans ces conditions, l’autre moitié languit sans débouchés certains ; rien n’est plus facile que de les reconnaître au premier coup d’œil ; dans l’une domine le bail à ferme, dans l’autre le métayage.

En Angleterre, la moitié sans débouchés n’existe plus depuis longtemps, partout la population rurale se trouve près d’une autre population, partout le débouché est aussi large que dans les meilleures portions de la France, et dans quelques-unes il va bien au-delà ; de là toute la différence entre les deux agricultures. Prenez les parties de la France et celles de l’Angleterre où le débouché est égal et aussi ancien, car il faut faire entrer aussi le temps dans la comparaison ; vous trouverez à coup sûr le même développement agricole, quelles que soient d’ailleurs les conditions de la propriété et de la culture. Toute autre considération est accessoire devant celle-là.

Dès que la vente des déniées est possible sur une grande échelle, l’attention du producteur se trouve naturellement appelée sur des questions tout à fait indifférentes jusque-là. Quel est le produit qui se vend le plus cher, relativement à son prix de revient ? quels sont les moyens de réduire le prix de revient pour augmenter le profit